Tout collectionneur de monnaies antiques est un jour amené à se poser des questions sur un exemplaire possiblement inédit qui passe entre ses mains. Il est humain de se croire détenteur d’un unicum et de s’accrocher à cet espoir sans envisager d’autres possibilités comme la production frauduleuse, qu’elle soit antique ou moderne.
Voici une monnaie qui pourrait servir d’exercice de réflexion.
Ae4 Valens A/ D N VALENS – [P F AVG], buste diadémé (perles), drapé et cuirassé à droite, R/ VOT / X / MVLT / XX dans une couronne de laurier, SLVG à l’exergue – Lyon – 367 / 375 – RIC. manque – Bastien manque – 13 à 13,5 mm / 1,15 g – NBD 93350
Lyonnaise ?
Elle manque aux ouvrages de référence que sont le Roman Imperial coinage volume IX et le monnayage de l’atelier de Lyon, du règne de Jovien à la mort de Jovin. Le module pourrait s’inscrire dans la tradition romaine de production de quinaires, module qui deviendra prédominant à partir du règne suivant de Gratien seul. Le revers correspondrait alors à la donativia de l’année 373 célébrant le « 4e consulat de Valentinien et de Valens, decennalia à partir de février » (1), ce que soulignerait le VOT / X à l’avers pour « Vota X soluta », les vœux pour la 10e année de règne réalisés, le MVLT / XX étant pour les « multis XX » les 20 années de règne à venir (suscepta).
Une silique présentant pratiquement les mêmes caractéristiques est connue pour la 1re officine (PLVG à l’exergue, Bastien 68 et RIC.19.2)
Pseudo-lyonnaise ?
La césure à l’avers est inhabituelle, l’atelier de Lyon ne l’utilise pas. Le type étant le même que celui de la silique précédemment évoquée, nous pourrions avoir à faire à une imitation reprenant les caractéristiques de la monnaie d’argent voire une silique fourrée sur laquelle l’argenture aura été récupérée. Autant que l’état de conservation du revers le laisse deviner, son style paraît frustre. D’ailleurs le seul exemplaire vu par Bastien de la silique à ce type présentait une légende erronée MVIT au lieu de MVLT.
En définitive, c’est une monnaie que le rasoir d’Ockham devrait faire ranger du côté des imitations, jusqu’à preuve du contraire.
1 : Bastien Monnaie et donativia au bas-empire page 96
Bibliographie
- Pierre Bastien, Le monnayage de l’atelier de Lyon du règne de Jovien à la mort de Jovin, 1987, Editions numismatique Romaine, Wetteren, Belgique
- Pierre Bastien Monnaies et donativa au Bas-Empire, Wetteren, 1988
- Pearce The Roman imperial coinage volume IX, Valentinian I – Theodosius I, Spink & Son, Londres, 1933
- NBD, http://www.nummus-bible-database.com/
D. BERTHOD