La plus chère des monnaies britanniques
C'est une monnaie emblématique de la numismatique britannique moderne qui vient d'être vendue par notre confrère anglais
A.H. Baldwin & Sons.
Il s'agit de la monnaie de 1 Livre sterling or (souverain) de 1937 frappée en qualité proof à l'effigie du roi Édouard VIII. Elle vient d'être vendue le 8 mai 2014 au prix de 516.000 Livres (soit 633.697 Euros) avec les frais.
C'est seulement la troisième fois que cette monnaie est proposée à la vente. C'est d'ailleurs le seul exemplaire à être entre les mains de collectionneurs privés. Il existe un seul autre exemplaire qui fait partie d'un set complet de 14 monnaies (du farthing à la monnaies de cinq livres or).
Du jeune prince au roi turbulent et imprévisible
Edward (1894-1972) est le fils aîné du prince Georges, duc de York, lui-même second fils du prince de Galles (le futur Edouard VII). Il devient prince de Galles en 1911. Si on lui refuse de prendre part aux combats de la Première Guerre Mondiale, il visite les tranchées. Jeune, élégant et célibataire, il représente son père Georges V lors de visites dans diverses partie de l'Empire et dans de nombreux pays étrangers et devient très populaire. Célibataire, Edward n'en est pas moins un coureur de jupons au grand désespoir de son père le roi Georges V. D'autre part, l'attitude et le comportement du futur roi iconoclaste et assez imprévisible sont assez déconcertantes tant pour ses parents que pour le monde politique. En 1930, il rencontre l'américaine Wallis Simpson mais ce n'est qu'en 1934 que cette dernière devient sa maîtresse.
Le 20 décembre 1936, le roi Georges V décède et Edward devient roi sous le nom d'Édouard VIII. Dès le lendemain, la présence à ses côtés de Wallis Simpson cause un malaise dans les cercles gouvernementaux et au sein même de la famille royale. La situation empire quand quelques mois après, il la demande en mariage, Mme Simpson étant divorcée de son premier mari et en instance de divorce de son second mari. En qualité de roi, Édouard VIII est aussi le chef de l'église anglicane alors totalement opposée au remariage des personnes si leur premiers époux ou épouses étaient toujours en vie. A la mi-novembre 1936, la crise constitutionnelle s'amplifie quand le roi convoque le premier ministre pour évoquer le futur mariage. Différentes options telles qu'une union civile ou un mariage morganatique sont envisagées mais rejetées par le Cabinet Britannique comme par les premiers ministres des dominions d'Australie, du Canada et de l'Afrique du Sud. Pourtant, Édouard VIII refuse de renoncer au mariage avec Wallis Simpson.

Édouard VIII est contraint de signer la déclaration d'abdication le 10 décembre 1936 en faveur de son frère Albert (futur Georges VI), la fille de ce dernier, la princesse Élisabeth (actuelle reine Élisabeth II) devenant la première dans l'ordre de succession. Le 11 décembre 1936, Édouard VIII s'adresse au peuple britannique dans
une allocution radiophonique.

Edward devient Duc de Windsor mais on lui refuse en 1937 le titre d'Altesse Royale. Le 3 juin 1937, il épouse Wallis au château de Candé près de Tours en France. Le gouvernement britannique refuse de les inclure sur la liste civile. On écarte volontairement Edward des affaires de l'Empire surtout depuis la visite du couple dans l'Allemagne Nazie. En juin 1940, le duc et la duchesse quittent la France pour l'Espagne puis Lisbonne. Edward est finalement nommé gouverneur des Bahamas afin de le soustraire aux intrigues des espions nazis. Il revient en France en 1945, ne revenant en Angleterre que pour les obsèques familiales. Il meurt à Paris en 1972.
Les improbables et rares monnaies d'Édouard VIII
La tradition veut que les monnaies soient frappées et mises en circulation lors du couronnement. Or s'il accéda au trône, Édouard VIII abdiqua avant son couronnement. Le rares monnaies à l'effigie d'Édouard VIII sont donc des épreuves datées de 1937. Contrairement à la tradition monétaire datant de Charles II qui veut que le profil du monarque sur les monnaies soit tourné dans la direction opposée à celle de son prédécesseur, Édouard VIII insiste pour qu'il soit tourné vers la gauche comme son père Georges V. Cela permet ainsi de voir la séparation de ses cheveux. Près de 200 coins de frappe sont prêts quand intervient l'abdication mais seules quelques épreuves sont effectivement frappées. Quatre sets complets - à noter l'absence du demi-souverain volontairement omis - sont conservés par la famille, le British Museum et le Royal Mint. Il semblerait qu'en 1951, Edward ait voulu obtenir un de ces sets, ce qui lui fut refusé sur décision de son frère Georges VI.
Il est donc plus que probable qu'il n'ait jamais eu une seule de ces monnaies entre les mains.
Les copies et souverains fantaisies à l'effigie d'Édouard VIII
Enfin, il me semble utile de prévenir nos amis collectionneurs quand aux monnaies actuellement en vente à l'effigie du roi Édouard VIII. Il ne s'agit que de copies ou de répliques (attention au poids ou titre or) le plus souvent datées 1936. Or comme cela avait été évoqué plus haut, il n'y a pas eu de frappes officielles en 1936. Les rares épreuves ont été certes frappées en 1936 mais datées 1937 dans la perspective de la cérémonie de couronnement alors envisagée.
Les éventuels futurs acheteurs de cet monnaie exceptionnelle devront s'armer de patience et surtout épargner dans l'attente de la remise en vente de cette monnaie.