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Le parcours de l’argent-métal sur ces trente dernières années | 20/07/2006 Informations À la fin des années 1970, deux riches texans, héritiers d’un père qui avait gagné un milliard de dollars dans le pétrole, décidèrent de multiplier cette fortune sans trop d’efforts...
L’idée de départ était simple : utiliser le marché des futures (voir BN015, page 11 et 12) et en exploiter la faiblesse principale : sa déconnexion de la réalité physique. Rappelons les bases : le marché des futures sert à aider les industriels à se fournir à terme de matières dont ils savent qu’ils vont en avoir besoin dans trois mois, ou plus, auprès de gens qui savent qu’ils auront ces matières à vendre dans trois mois, ou plus... On achète et on vend donc à terme. Si l’on a vendu à terme et que les cours baissent, on gagne puisque on a vendu au cours d’aujourd’hui et que l’on se rachète moins cher trois mois plus tard pour « livrer ». Sinon... on perd. Bien évidemment, les spéculateurs ont vu là une opportunité d’enfourcher un cheval qui ne leur demandait rien et, dans la pratique, plus de 95% des contrats traités sur ce marché ne sont jamais livrés physiquement et correspondent juste à des écritures comptables et à des chèques pour solder la perte ou le gain. Pour lire une belle histoire sur le sujet, en français, «le Sucre» de Georges Conchon, également au cinéma avec Depardieu et Jean Carmet ; pour une fois qu’un bon film est pédagogique, autant en profiter ! William Herbert Hunt et Nelson Bunker Hunt, sachant que les quantités jouées par les spéculateurs chaque jour étaient bien supérieures non seulement au métal physique disponible mais encore à la production de plusieurs années, décidèrent après avoir accumulé tout l’argent physique disponible possible de prendre un très grand nombre de contrats «acheteurs» à terme. Ils s’engageaint donc à acheter x millions d’onces de métal dans trois mois, six mois sur la base du cours au moment de la transaction. Bien entendu, avec une manipulation aussi massive, non seulement les cours montèrent irrésistiblement, leur procurant donc des gains plantureux, mais, au lieu d’empocher une simple plus-value par chèque, ils demandèrent livraison effective du métal. Impossible évidemment de le trouver sauf à payer encore beaucoup plus cher puisque les Hunt avaient déjà ramassé presque tout le métal physique disponible. Les cours devinrent rapidement astronomiques, le marché était, selon l’expression américaine « en corner » : les autres spéculateurs étaient coincés, acculés. À ce jeu, on gagne toujours, à condition de pouvoir payer ce qui se présente et l’argent métal physique, aspiré par des prix incroyables se mit à couler en rivières de plus en plus larges de tous les pays du monde vers les frères Hunt. On fondit des monnaies, des bijoux, de la vaisselle, des couverts... par milliers de tonnes. Pour continuer d’acheter pour maintenir la pression, les frères Hunt allèrent chercher de riches investisseurs arabes. Pour éclairer la situation, le prix passa de 1,95$ l’once en 1973 (31,1 grammes, l’unité de référence internationale pour les métaux précieux, même la Monnaie de Paris frappe des monnaies en onces, demi-onces, quarts d’onces etc...) à 5$ en 1979. Ceci explique pourquoi, dès 1973, la Monnaie de Paris cessa de fabriquer des 10 francs en argent, pour passer aux 50 francs, et pourquoi cette série s’interrompit aussi en 1980 : les coûts de fabrication étaient devenus intenables, le contenu métallique coûtant beaucoup plus cher que la faciale de la pièce. On considère que pendant ces six années les frères Hunt accumulèrent la moitié de tout l’argent métal disponible sur la planète... ![]() En 1980, l’argent-métal avait atteint 54$ l’once... La pièce de 5 francs Semeuse se vendait 35 francs aux fondeurs ! (actuellement, 1,3 €) On n’imagine pas le délire de cette période : les monnaies d’argent étaient conditionnées par sacs scellés, sans considération de contenu mais seulement de titre de pureté, on ne prenait même plus le temps de les fondre. On se doute bien que, n’importe quel écu de 5 francs valant 100 francs/1980 au poids, (équivalent de 250 francs de 2001 en pouvoir d’achat), personne ne triait plus les pièces et les sacs pouvaient littéralement contenir n’importe quoi... On m’a même raconté l’histoire de sacs de métal envoyés par avion aux USA qui sont revenus intacts après l’effondrement des cours : personne n’avait eu le temps de les fondre. Scellés, ils avaient attendu leur sort... ![]() Ce succès incroyable, bonus moralement difficile à accepter d’une spéculation effrénée, sans la moindre création de richesses, d’emploi ou de développement, provoqua (les mauvaises langues, mais ce sont sûrement uniquement des mauvaises langues, prétendent que l’ethnie des investisseurs partenaires joua un rôle dans cette décision) une réaction du gouvernement. Un sénateur, peu connu jusque là, proposa une loi taillée sur mesure pour assassiner financièrement les Hunt : la limitation drastique du nombre de contrats qu’un seul homme ou institution pouvait détenir simultanément. La mort financière assurée pour des gens qui détenaient des millions de contrats (on appelle contrat l’engagement d’acheter ou vendre à terme une quantité donnée de métal). Ils furent obligés de liquider leurs positions de toute urgence, avec des pertes colossales. Du jour au lendemain (en réalité dans la même journée, car rien n’était plus liquide, le marché étant sans contre-parties) l’argent métal perdit 50% de sa valeur, le 27 mars 1980. ![]() Non seulement cela fut l’une des plus grosses faillites de l’histoire des USA mais ils furent poursuivis devant les tribunaux pour manipulation des marchés. Entre temps, ils avaient accumulé une collection extraordinaire de monnaies antiques, collection qui fut dispersée chez Sotheby’s dans une série de ventes à couper le souffle. Nous présentons dans MONNAIES XXVI, un exceptionnel tétradrachme de Philippe V provenant de cette vente. Certes, ce fut la fin des Hunt, mais pas du tout la fin de l’argent-métal quoique celui-ci, après une décade prodigieuse, retrouva le calme d’un grand fleuve, les spéculateurs le craignant comme la ruine. Les cours se stabilisèrent pendant près de vingt ans vers 3,5$ l’once jusqu’à ce qu’un grand financier, Warren Buffet, commence à s’y intéresser et fasse monter le cours jusqu’à 7,6$ en 1998. Ce ne fut qu’une courte embellie et en novembre 2001, les cours étaient retombés à 4,06$ l’once. L’or était alors également dans les plus bas, vers 250$ et on constate qu’à partir de ce moment les cours des deux métaux précieux allaient monter l’un vers13$ l’once et l’autre de vers 650/730$. La différence essentielle entre ces deux métaux tient à deux caractéristiques. L’or est une valeur refuge bien plus que l’argent, simplement pour des raisons d’encombrement, et il est bien plus impliqué que l’argent dans les mouvements des devises et des banques centrales. Pire, la différence de valeur intrinsèque fait que l’or est récupéré avec bien plus de soin que l’argent. Pour la même raison, mais en effet inverse, l’argent est beaucoup plus utilisé que l’or dans des applications industrielles. Contrairement à l’or, la demande industrielle d’argent-métal, qui correspond à une véritable utilisation, alors que la thésaurisation correspond simplement à un stockage, est largement majoritaire par rapport à la demande des investisseurs. C’est donc un marché moins « volatile » et plus « sain ». Encore au contraire de l’or, les réserves immédiatement disponibles sont très faibles pour l’argent, faute justement de thésaurisation. Aucune banque centrale n’en détient une quantité sérieuse, les mines vendent à court terme, voire à découvert, une brusque demande ne peut donc trouver de contre-partie physique immédiate. Peut-on penser que l’argent, qui est lui aussi, en réalité, une valeur refuge comme l’or, est une alternative sérieuse à celui-ci ? Pour les gens qui ont de gros moyens, assez pour laisser dormir de leurs fonds pendant longtemps, de les oublier, toujours la même question : avez-vous une très grande cave ? Avec l’équivalent d’un kilo d’or, vous avez soixante kilos d’argent... Avez-vous une très grande cave ? L’histoire nous renseigne assez peu car le ratio or/argent a largement varié, restant stable à des positions très éloignées des fondamentaux pendant des durées parfois très longues. On appelle ratio la quantité d’argent que l’on peut acheter avec la même valeur en or. À Rome, le ratio oscille aux alentours de 12. Sous les Louis, après la réforme de 1726, il passe de 18,07 à 14,46. Lorsque Bonaparte crée le franc, à la fois exprimé en or et en argent, un napoléon de 20 francs pèse 5,8 grammes d’or fin et correspond à quatre pièces de cinq francs en argent, donc à 90 grammes d’argent fin. Le ratio est donc de 90/5,8 = 15,5. Le système du bi-métalisme explose par la découverte d’immenses mines d’argent qui font baisser les prix et en 1914, le ratio est de 41, mais en 1919, il est retombé à 16. En 1941, il est à 100 mais retombera lentement jusqu’à 16 en 1967. En 1991, il est remonté à 100 mais va retomber à 40 en 1998. En juin 2003, il est à 82 et aujourd’hui de 53. L’argent montera-t-il suffisamment pour retrouver son ratio historique de 16 ? Pourquoi cela concerne-t-il le collectionneur ? Parce que si tel est le cas, toutes choses égales par ailleurs, on dépasse 1000€ le kilo, donc les écus sont fondus jusqu’à un prix unitaire de 23 €. Si vous visitez la boutique modernes cgb.fr, vous verrez que plus de la moitié des écus Louis-Philippe proposés sont en-dessous de ce prix unitaire. Michel Prieur ![]() |
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