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LA PESTE JAUNE DE BARCELONE-1821

| 16/05/2021
Informations

 
Médaille de l’aide française durant la peste de Barcelone de 1821, par GAYRARD - 1821 Louis XVIII (1814, 1815-1824) Raymond GAYRARD Cuivre 47,6 mm 12h 49,81 g. - (LA GALERIE DES MONNAIES) A/ PIETAS - GALLICA. Devant les remparts avec deux tours crénelées, la ville de Barcelone allongée, agonisante, soutenue à gauche par la Religion tenant une croix, à droite, la Médecine tenant un caducée, lui tendant une coupe de remède ; au-dessus, le démon de l’Epidémie passant à gauche en déversant la maladie depuis un vase ; à l’exergue, en trois lignes : SAEVIENTE IN BARCINONAM / PESTILENTIA / MDCCCXXI » ; signature en bordure en bas à gauche : GAYRARD INV. R/ MORTE. VENALEM. PETIERE. PALMAM. Inscription en onze lignes, accostée d’un rameau d’olivier et d’une palme : V. VIRI. MEDICI / QVORVM. PRIMVS. OCCVBVIT. / MAZET. / PARISET. / BALLY. / FRANÇOIS. / AUDOUARD. / SANCTI.-MONIALES. II. / SANCTO. CAMILLO. DEVOTAE. / LVDOVICI. XVIII. REGNI / ANN. XXVIII. Avec l’aimable autorisation de www.galerie-des-monnaies.fr, cliché Julien DAPSENS-TURQUAT.

1821, cette année-là, il avait fait très chaud en Catalogne, Barcelone venait de connaître un été long et torride. Au début du mois d’août, plusieurs décès subits sont relevés dans la ville. Le 5 août, le journal Diaro de Barcelona fait état de 12 morts, le 16 août on en compte 18 de plus et 44 le 26, 50 le 29 août. En quelques jours une terrible épidémie, une peste consume Barcelone.

Fièvre, vomissements sanglants, douleurs, jaunisse. On meurt partout d’abord et surtout dans les quartiers pauvres. Un mal inconnu tue une population sans défense, sans immunité. Les autorités locales commencent par nier l’évidence puis, complètement dépassées, ne savent plus à quel saint se vouer. On distribue des médailles ou des images de saint Roch… on organise des messes et des processions, des rassemblements qui finalement favorisent la diffusion du mal.

Un jeune Italien dénommé Simonda, étudiant en médecine, libéral réfugié en Espagne, identifie le mal : « è la fiebre amarilla…». C’est la fièvre jaune. Il alerte les autorités de la ville qui ne le prennent pas en considération, le traitant de farfelu. Il mourra au temps le plus fort de l’épidémie, soignant la population.

En provenance de La Havane, un voilier à deux mâts gréé en voiles carrées, le « Gran Turco » qu’on suspecte de pratiquer la traite des Noirs, vient d’arriver à quai. Il importe le germe qui, opérant son œuvre sur les quais, dans le port, doit s’étendre rapidement à tous les quartiers et à toute la population. Le consul de Suède succombe au mal. Ceux qui le peuvent, les plus fortunés fuient la ville et là où ils arrivent, c’est avec des fourches et des coups de fusils que souvent on les accueille. Madrid décrète une quarantaine, Barcelone est isolée. Dans la capitale, les courses de taureaux sont interdites… En septembre le mal a atteint tous les quartiers, les autorités royales, certains médecins prennent la fuite. Barcelone sombre dans le chaos. Le 19 septembre on ferme les églises. On essaie d’établir un cordon sanitaire autour de la ville, mais il suffit de quelques pièces de monnaies pour le franchir. Au-delà de ce périmètre viennent s’installer des cabarets et des prostituées…

La désorganisation, la paralysie portuaire entraine dans ce contexte une famine qui génère des émeutes dès la fin du mois de septembre.

La France de Louis XVIII ne peut manquer de réagir à ces nouvelles. Les ports français sont fermés aux navires catalans et 15 000 soldats ferment les Pyrénées. Des navires de guerre sont envoyés pour surveiller les côtes des Pyrénées orientales. Le courrier arrivant d’Espagne est systématiquement immergé dans le vinaigre. Une mission d’assistance composée de six médecins et de deux religieuses de l’ordre de Saint-Camille est dépêchée sur les lieux le 8 octobre. Ce sont les Dr Victor Bally, le Dr Etienne Pariset, le Dr André Mazet, le Dr Victor-Joseph Francois, le Dr J.A. Rochoux, le Dr Mathieu Audouard. Malgré la mort du Dr Mazet (qui tombe malade le 12 et décède le 22) et la grande dévotion de la plupart des membres de l’équipée, cette intervention se montre d’une relative inutilité. La médecine de l’époque ne savait rien de ce mal médié par un moustique et ne connaissait aucun traitement. Il aura fallu infliger à ces malheureux des saignées, des lavements et des fumigations… Pourtant ils furent accueillis à leur retour en France comme des héros et des bienfaiteurs de l’humanité… justifiant la création d’articles, de romans, de pièces de théâtre, de poèmes, d’odes, de médailles, de monuments… L’intérêt soulevé en France par l’épidémie de Barcelone était, pour l’époque, assez inhabituel.

Début octobre, on compte chaque jour plus de 200 morts. Dès le 11 octobre, on évacue la ville, les survivants sont installés dans des baraquements en dehors de la ville. En novembre, l’épidémie commence à s’éteindre et le 24, les survivants pour remercier Dieu lui adresse un Te Deum. Un mois plus tard, avec les premiers froids, il n’y avait plus de malades et le port put reprendre son activité pour la Noël 1821. Nous ne savons pas exactement combien de personnes sont mortes victimes de cette épidémie. Nous ne disposons pas de statistiques fiables et le recensement des décès à l’hôpital s’avère incomplet. On avance le chiffre de 20 000 morts pour une population de 120 000 âmes.

Très vite, naturellement, on en vient aux règlements de compte habituels, on dénonce la responsabilité des uns et des autres. La politique s’en mêlant, on met en charge le gouvernement libéral du roi Ferdinand VII. L’Eglise voit dans l’épidémie la conséquence directe du « relâchement des mœurs » et la « punition de Dieu »…

En 1820, Ferdinand VII, roi d’Espagne, avait été obligé d’accepter une Constitution libérale. C’est dans cet Etat que de nombreux opposants politiques (bonapartistes, républicains, carbonari…) trouvèrent refuge. Ainsi, aux portes de la France se trouvait un « pays malsain de libéralisme », un danger, un « foyer de révolution ». Louis XVIII profita de cette « opportunité » pour confondre une intervention sanitaire contre « la peste jaune » avec le dessein d’éradication de « la peste révolutionnaire » en préparant l’invasion de l’Espagne pour y rétablir l’absolutisme, ce qui arriva en 1823…

Très injustement, la médecine française, la « médecine moderne » sortent glorifiées de ce grand malheur. La médecine se défait de la caricature dans laquelle monsieur Molière l’avait plongée. La médecine française passe en ce temps pour la première au monde et le statut du Médecin retrouve une place d’honneur au sein de la société qu’il conservera jusqu’à nos jours peut-être de manière plus méritoire…

La fièvre jaune aujourd’hui.

La fièvre jaune est une maladie hémorragique virale aiguë transmise par les moustiques. Le terme « jaune » fait référence à la jaunisse que développent certains patients. La maladie est transmissible d’homme à homme via les piqûres de moustiques. Selon l’Organisation mondiale de la Santé, 200 000 personnes contractent la fièvre jaune chaque année. Parmi elles, 30 000 meurent de cette maladie, essentiellement en Afrique. Il n’existe aucun traitement contre la fièvre jaune en tant que telle, seuls les symptômes peuvent être pris en charge. Un vaccin préventif est disponible et la vaccination est obligatoire pour les personnes se rendant dans certains pays à risque, en Afrique et en Amérique latine. Un vaccin.

SFERRAZZA A.

RÉFÉRENCES

• CARTER HR - Yellow fever ; an epidemiological and historical study of its origin. William R. Willkins, Edit, Baltimore, 1931, 308 p.
• HOFFMANN LF - La Peste à Barcelone. Presses Universitaires de France, Paris, 1964, 103 p.
• MARCHOUX E, SALIMBENI A & SIMOND PL - La fièvre jaune ; rapport de la mission française. Ann Inst Pasteur, 1903, 17, 6 6 5 - 7 3 1.
• REED W, CARROLL J, AGRAMONTE A & LAZEAR W - The etiologyof yellow fever ; a preliminary note. Philadelphia Med J,1901, 6, 790-796.
• THEODORIDES J - Pierre RAYER (1793-1867) : Un demi-siècle de médecine française. Editions Louis Pariente, Paris, 1997, 266 p.
• C. CHASTELS- La « peste » de Barcelone. Epidémie de fièvre jaune de 1821.
• Remerciements à www.galerie-des-monnaies.fr, cliché Julien DAPSENS-TURQUAT.

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