Avec le temps on apprend, en partie à cause d’erreurs commises et aussi en observant l’évolution de la numismatique, ainsi que les différents acteurs qui la compose.
Lorsque je consulte un catalogue numismatique au format papier (éventuellement pdf) ou numérique, je remarque plusieurs choses :
- Les monnaies sont gradées ou pas pour les monnaies à partir de 1800.
Les maisons de vente américaines ne vendent pratiquement que des monnaies gradées, et cela depuis très longtemps. L’absence de grade d’une monnaie lors d’une vente fait penser à un « problème ». Dans le cas des maisons de vente européennes, certaines se sont mises à vendre majoritairement des monnaies gradées pour la simple raison qu’elles ont compris que les monnaies se vendaient mieux. À Paris par exemple, les monnaies gradées sont rares lors de ventes aux enchères, ce qui à mon avis pour les monnaies rares et de qualité est une erreur.
De nombreux experts n’ont pas encore compris qu’une monnaie gradée MS65 ou MS66 ou MS67 ne se vend pas au même prix et cela malheureusement au dépend du vendeur. Combien de fois ai-je vu des monnaies non gradées vendues à un certain prix, réapparaitre dans une vente postérieure mais gradée avec un prix de vente 50% voire 100% supérieur !
- La description des monnaies.
Il y a des descriptions simples au possible, avec comme description de qualité TTB, superbe… et rien de plus. D’autres sont plus élaborées et présentent un bref historique de la monnaie en question ou du personnage, ainsi qu’une description sur la frappe, la patine, le visuel…
Il faut bien se dire que ce n’est pas la même chose de proposer en vente une pièce à 200€ qu’une à 5 000€, et les clients potentiels qui ne peuvent pas voir personnellement les pièces doivent se baser uniquement sur l’opinion de l’expert et donc de la description !
- La présentation des monnaies.
Quand je vois que de nos jours, les grandes maisons de vente japonaises présentent les monnaies avec des photos qui ne sont pas en couleurs, cela me laisse perplexe. Alors que les numismates peuvent faire pivoter les monnaies sur certains sites américains, d’autres en sont encore aux photos en blanc et noir !
J’ai avec le temps constitué une bibliothèque numismatique raisonnable, composée entre autres de catalogues de ventes aux enchères, qui s’étend sur la période 1900-2020. Si je consulte un catalogue de vente des années 80 de l’expert Jean Vinchon, je constate que dans le cas de monnaies rares et de qualité, il y avait une page spéciale « couleur » et très souvent avec des agrandissements de certaines monnaies. C’est aussi simple que ça !
J’ai des catalogues qui datent de 1920 dont les photos noir et blanc sont de bien meilleure qualité et il s’est passé un SIÈCLE !
Voici la même monnaie avec des images de qualité différente, la première est décrite comme splendide et la deuxième MS66 (vous pouvez zoomer sur les images, mais vous vous rendrez compte que dans un cas l’image est chaque fois plus floue, alors que dans l’autre cas, l’image est nette et précise) :


Images courtoisie de Heritage
Seriez-vous disposé à placer la même enchère sur les deux monnaies ? La réponse est bien évidemment non. Cependant c’est la même monnaie !
Le soin apporté à chacun de ces « critères » par la maison de vente est « logiquement » significatif quant à la qualité et la rareté des monnaies proposées. C’est l’équivalent d’une vitrine où la présentation des articles, décors, etc., sont essentiels. Il y a une seule exception à cette règle, les maisons de vente japonaises, qui présentent parfois des monnaies très rares et de superbe qualité, MAIS leurs catalogues laissent à désirer. Il est vraiment difficile de faire pire, par contre pratiquement toutes les monnaies proposées sont gradées !
À mes yeux, le catalogue papier, au format pdf ou la présentation sur un site internet est fondamentale. Ce que je veux dire par-là c’est que la photo en blanc et noir de mauvaise qualité d’une monnaie non gradée, avec une description sommaire, ne vend pas. Je conçois parfaitement que dans le cas d’une monnaie avec une cote basse, cela ne soit pas envisageable, car « time is money », mais il y a des cas où cela est vraiment indispensable et je conseille à l’expert qui n’a pas encore compris ça de méditer sur ce sujet.
Généralement, les grandes collections sont dispersées par les grandes maisons de vente et cela ne peut pas en être autrement. Ces collections se sont bâties principalement à travers des achats dans ces mêmes maisons de ventes et un lien s’est créé. Pour quelle mystérieuse raison je vendrais ma collection à travers une maison de vente avec laquelle je n’ai aucun lien ?
Dans le cas d’une collection héritée, la donne change et celle-ci peut être dispersée par une autre maison de vente, car souvent les héritiers ont très peu d’informations quant à la collection. On voit parfois des collections intéressantes dispersées par exemple à Paris, mais malheureusement je constate que certaines monnaies qui devraient être mises en valeur, ne le sont pas à la hauteur de ce qu’elles devraient. Il se peut que l’on trouve parmi des monnaies assez courantes une dix louis d’or qui comme tout numismate sait, n’est pas une monnaie que l’on trouve chez tous les professionnels et pourtant, la description est vraiment limitée ! Quant aux monnaies cataloguées par l’expert comme splendides ou exceptionnelles, elles ne sont jamais gradées, ce qui est vraiment regrettable, car cela ne remettrait pas en cause le rôle de l’expert. Bien au contraire, cela confirmerait la justesse de son expertise ! Personnellement, à partir d’un certain montant, je ne mise pas sur une monnaie non gradée. Je ne vois pas pourquoi j’achèterais sans garantie particulière !
Nous sommes à une époque où tous les experts, professionnels et maisons de vente ont leur propre site internet. Pourquoi ne pas présenter de façon individuelle les plus belles monnaies en couleurs, avec une très bonne définition, surtout sachant que de nos jours on peut obtenir des photos magnifiques avec un appareil photo pas très sophistiqué et qu’en plus, avoir ces images sur le site n’engendre pas un coût énorme, bien au contraire !
Personnellement, si je travaillais dans ce milieu, j’aurais depuis très longtemps présenté mon stock sur mon site, pour la simple raison que l’on ne vend pas ce que l’on ne montre pas ! Si vous avez beaucoup de monnaies en stock, il suffit de commencer par les plus chères et d’en rajouter périodiquement dans la mesure du temps disponible.
J’ai remarqué que la communication avec de nombreux experts est un peu « brève », or cela fait partie d’un « ensemble »: Le contact, l’amabilité, la sympathie font partie intégrante du lien que vous allez ou pas établir dans le temps avec le client. Qu’un collectionneur soit à la recherche d’une monnaie à 20€ ou 2 000, ne devrait pas changer l’attitude du vendeur et le soin apporté à cette vente. Un simple conseil ou un peu de conversation sur le domaine de collection du client ne coûte pas grand-chose et sera très probablement positif. Il m’est arrivé plus d’une fois de demander des monnaies d’une série en particulier et la réponse a été en général : je n’en ai pas ! Fin de la conversation. Si l’imagination du vendeur s’arrête là, il a vraiment du souci à se faire pour l’avenir !
J’ai eu affaire à plusieurs reprises à de haut responsable aux USA, chez Heritage et Stacks Bowers et j’ai toujours été traité de façon chaleureuse. La réponse aux emails que j’ai pu envoyer ne se fait pas attendre et lorsque j’ai voulu avoir plus d’informations sur une monnaie en particulier, la réponse a toujours été très complète : j’ai eu la monnaie entre les mains ou j’ai parlé avec le collègue qui l’a cataloguée… patine, coups, grade… « J’ai vu mieux mais cela fait très longtemps et pas souvent »… et pourtant je ne suis pas un client particulièrement important.
Le jeune collectionneur avec peu de moyens peut devenir demain un grand numismate ; on sème aujourd’hui ce que l’on récoltera dans le futur !
Yves BLOT