
GEORGES MATHIEU
GESTE, VITESSE, MOUVEMENT À LA MONNAIE DE PARIS
Réinstallée dans son lieu d’origine, la toile Les Nymphes de Diane accueille du 11 avril au 7 septembre, au sein de l’escalier d’honneur le public souhaitant (re)découvrir l’artiste officiel des années 1960 et 1970, Georges Mathieu.
Cette exposition, divisée en douze salles selon une logique chrono-thématique, dévoile les temps forts de l’artiste, sans omettre cependant de montrer que chacune de ces périodes artistiques pouvait être simultanée.

Présentée dans les salles historiques de la Monnaie de Paris, cette rétrospective – Visions d’histoire, Limbes, Emprise du signe et geste médiévale, Un imaginaire topographique, L’attrait du Grand Siècle, Période orthogonale, Suite en blanc, La télévision « art de notre temps », Œuvres zen et L’avenir d’un style – présente un panorama complet de l’œuvre de l’artiste, 50 ans après la première exposition qui s’était tenue à l’Hôtel de la Monnaie en 1971.

Dans une continuité de collaboration avec la Monnaie de Paris, et une amitié avec son directeur de l’époque Pierre Dehaye, l’exposition souhaite mettre en lumière sa contribution à l’art de l’abstraction, à la culture populaire mais aussi sa collaboration avec la Monnaie. L’exposition s’ouvre avec quatre grandes toiles, comme par exemple Les Capétiens partout (1954), représentatives de sa personnalité complexe : aimant le risque et la nouveauté, mais également érudit. Grâce à des titres soigneusement choisis en référence à des événements historiques de l’Ancien Régime et aidé de son propre langage et symboles propres, George Mathieu se dévoile comme un artiste cultivé, dandy à la personnalité complexe pour ceux qui refusent de la comprendre.

Figure 1: Cartel, Salon Dupré, « Visions d’histoire »
Photographie prise par Barbu A
Aux côtés des toiles, les cartels contribuent brillamment à la compréhension, non seulement de l’œuvre de Georges Mathieu, mais aussi à sa démarche artistique. Comme le souligne le sous-titre de l’exposition, l’artiste maîtrise parfaitement le geste, la vitesse et le mouvement, créant certaines toiles en à peine une trentaine de minutes. L’exposition met ainsi en évidence que Georges Mathieu était bien plus qu’un simple peintre : c’était également un remarquable communicateur. Pour illustrer cette dimension, une reproduction d’un détail de son appartement est également présentée. Aménagé dans un style Louis XIV, ce décor, mis en scène par la Monnaie de Paris, révèle toute l’excentricité revendiquée de l’artiste. Ce goût affirmé pour la mise en scène a largement contribué à façonner un véritable personnage autour de lui tout au long de sa carrière.

Figure 2 : Salon Franklin, « L’attrait du grand siècle »,
Photographie prise par Barbu A
L’exposition n’omet évidemment pas d’évoquer la collaboration de Georges Mathieu avec la Monnaie de Paris, en particulier la création de la célèbre pièce de 10 francs. La contribution de l’artiste à l’art métallique est notamment mise à l’honneur dans une jolie vitrine consacrée à sa série de médailles Les Dix-Huit Moments de la conscience occidentale (1971), exposée dans la salle Duvivier sous le titre Période orthogonale.

Grâce à une scénographie dynamique, le visiteur peut admirer l’ensemble des médailles de cette collection, dont celle consacrée au Sac de Rome (fme_768169), Crédit du Nord (fme_1004305), ou encore celle pour la ligne SNCF Rouen (fme_964206). Médailles qui sont d’ailleurs également visibles et disponibles sur notre site Cgb.fr.

Figure 3 : Salon Duvivier, « Période orthogonale ».
Détail de la vitrine des médailles, Photographie par Barbu
Trois ans plus tard, l’artiste décide de participer au concours lancé pour la conception d’une nouvelle pièce de 10 francs, une initiative encouragée par Pierre Dehaye, alors directeur de la Monnaie de Paris.
Le parcours de création de cette monnaie emblématique est restitué avec précision au sein de l’exposition. Grâce aux photographies inédites découvertes par Béatrice Coullaré chez l’ayant droit de l’artiste, le visiteur est invité à pénétrer dans les coulisses du processus créatif de cette pièce devenue iconique.

Figure 4 : Salon Duvivier, « Période orthogonale », Georges Mathieu.
Le parcours de l’exposition parvient avec justesse à faire ressortir la pluridisciplinarité de Georges Mathieu à travers plusieurs projets emblématiques, tels que la série d’affiches réalisées pour Air France en 1967, les deux services créés pour la Manufacture de Sèvres, ou encore le générique conçu pour la chaîne Antenne 2. Contrairement à bon nombre de ses contemporains, Mathieu s’est illustré tout au long de sa carrière par une véritable capacité d’innovation, tant sur le plan technique — en intégrant, par exemple, le dripping — que stylistique, en puisant dans l’esthétique japonaise ou l’inspiration du paysage urbain moderne. Son engagement artistique s’étend également à des projets d’envergure, comme le concours pour la façade du siège de RTL. Par ailleurs, en tant que scénographe de ses propres expositions, il assumait pleinement la mise en scène de ses œuvres, témoignant ainsi d’une maîtrise totale de leur présentation et d’une vision artistique globale.
Devenu un artiste quelque peu oublié en fin de carrière, sans doute en raison de sa personnalité complexe, Georges Mathieu continue pourtant d’exercer une influence sur la scène artistique contemporaine. La Monnaie de Paris a souhaité mettre en évidence cet impact à travers un dialogue entre son œuvre et l’art urbain.
Dans les salles Graffiti x Georges Mathieu, un lien est établi entre les gestes et les pratiques de Mathieu et ceux de six artistes contemporains issus du street art : JonOne, Lek & Sowat, Nassyo, Camille Gendron et Matt Zerfa. Chacun d’eux a bénéficié d’un espace dédié pour créer, in situ, de grandes fresques originales, illustrant ainsi les correspondances entre leur univers et celui du peintre.
Alina BARBU