L’Association des Amis du Franc promeut, depuis sa création, la recherche numismatique, qu’elle soit guidée par l’observation poussée des monnaies ou par l’exploitation de documents d’archives. Cet objet est d’ailleurs spécifié dans ses statuts.
Les recherches en archives menées il y a plusieurs années par Xavier Bourbon et Philippe Théret avaient ouvert la voie concernant le degré de connaissance poussé que l’on pouvait atteindre sur un domaine aussi restreint que les monnaies décimales d’Augustin Dupré qui ne couvrent que huit années de notre histoire monétaire.
L’idée un peu folle d’étendre ce type de recherche à toute la période moderne du franc a vite vu le jour, malgré l’ampleur du travail envisagé par la couverture de plus de deux cents années de notre histoire monétaire.
Le bureau des ADF est heureux de pouvoir vous présenter la synthèse de cette recherche, fruit de près de six mille heures de travail, matérialisée dans une toute nouvelle édition du FRANC. Si nous avons conservé le titre principal, son contenu diffère significativement des précédentes éditions. Le format passe à cette occasion en « A5 étendu » pour bénéficier de plus d’espace, et atteint malgré cela plus de 1 150 pages afin de contenir les nombreuses nouvelles informations. Sur la forme, si les tableaux de cotations sont maintenus, il ne s’agit en rien du travail principal. Afin de supprimer les notes de bas de pages des précédentes éditions, de faire figurer de manière très synthétique l’ensemble des lignes recensées aujourd’hui, un gros travail sur l’iconographie des variantes a été réalisé. Cela permet également de présenter ces tableaux de cotations en « bi-colonne », et ainsi libérer de l’espace pour d’autres informations.
Les informations nouvelles issues des archives sont omniprésentes. En amont, nous avons accumulé plus de 100 000 photos d’archives, provenant principalement de la Monnaie de Paris. Le contenu est particulièrement riche puisque l’on y trouve :
• des registres de fabrication, de délivrances ;
• des registres de livraisons de coins ;
• des registres ou des dossiers de correspondance entre l’Administration et les ateliers, entre le ministre des Finances et l’Administration, entre le graveur général et l’Administration… ;
• des dossiers d’instruction des concours monétaires ;
• des dossiers des directeurs de la Monnaie ;
• des archives de graveurs généraux ;
• des dossiers techniques sur la fabrication ;
• des dossiers techniques sur les expérimentations chimiques ;
• des procès-verbaux de frappes d’essais, de piéforts ;
• des documents législatifs sur la monnaie ;
• des dessins, des croquis, des plans ;
• des documents juridiques sur de la fausse monnaie ;
• des documents organisationnels ;
• des approvisionnements en métaux, commandes ;
• etc.
Selon les périodes, les types de documents diffèrent et présentent des niveaux de détails et d’informations très disparates.
Grâce au classement réalisé par Jean-Marie Darnis, il a été possible de se focaliser sur les documents qui nous ont paru les plus essentiels. Mais les pépites se cachent parfois dans des océans d’informations plus banales. Seul un travail systématique pourra un jour nous satisfaire pleinement, notamment pour les registres de fabrications du XXe siècle. De surcroît, plusieurs registres sont aujourd’hui inaccessibles car contaminés par des champignons et doivent subir des traitements qui ne les rendront consultables que dans plusieurs mois voire plusieurs années. Néanmoins, les découvertes effectuées au travers de ces documents numérisés sont d’importance, et ce quelles que soient les périodes étudiées.
Les archives de la Monnaie de Paris constituent notre source principale. Mais nous avons également exploité des dossiers sur Dupré détenus au Cabinet des médailles de la BnF, les dossiers d’instruction du procès de Camélinat détenus au Service historique de la Défense à Vincennes, des archives et médailliers du musée Carnavalet-Histoire de Pariset les archives personnelles de la descendance du graveur Auguste-François Michaut. Les sources ont été multiples et très variées.
STRUCTURE ET CONTENU DU LIVRE
Pour les habitués des précédentes éditions du FRANC, le premier changement concerne l’organisation du livre. La présentation par valeur faciale puis chronologique est remplacée par une présentation par période historique, permettant de replacer les monnaies dans leur contexte historique et politique. Par ailleurs, beaucoup d’informations monétaires sont communes à plusieurs faciales pour une même période. Il est ainsi plus cohérent de les présenter de manière regroupée. Nous avons ainsi un chapitre par période historique, et chaque chapitre se décompose en trois parties. La première regroupe tous les événements monétaires de la période concernée. C’est peut-être dans cette partie que l’on sentira le plus l’apport des archives. On y trouvera notamment toutes les informations sur les naissances des types monétaires avec, quand cela fut le cas, les informations détaillées des concours desquels ils sont issus. La seconde partie regroupe les types monétaires triés par valeur faciale. Au sein de chaque type, le lecteur trouvera des informations issues de l’observation ou des archives, concernant telle ou telle ligne spécifique. À ce titre, on trouvera des apports nouveaux concernant les chiffres de fabrication, l’existence possible de variantes ou au contraire la preuve de leur absence.
Enfin, la troisième partie est dédiée aux états de conservation. Les éditions précédentes apportaient des descriptifs textuels des états, permettant de graduer une monnaie d’un type donné. Il nous a paru nécessaire d’aller plus loin et de les illustrer. Tous les détails servant à l’analyse sont ainsi présentés dans tous les états sous forme d’une loupe, de même que les monnaies en entier. Quand les évolutions de l’usure d’un type, pour des valeurs faciales ou des compositions métalliques différentes, sont les mêmes, les illustrations des états sont évidemment regroupées pour éviter les redites inutiles. Sans cette mutualisation, avec plus de 340 types recensés et 2 pages par type, il aurait fallu plus de 680 pages uniquement pour les illustrations des états de conservation !
L’identification des états de conservation perd de son utilité avec l’apparition des premières boîtes FDC à partir de 1964 et ne justifie pas une illustration. Par ailleurs, pour les monnaies de la Ve République, antérieures à 1964, qui sont très communes, nous nous contentons d’illustrer les trois états les plus élevés SUP, SPL et FDC.
Nous avons consacré près de 150 pages aux illustrations des états de conservation. Nous espérons que cela rendra service aux débutants et aux non spécialistes d’un type en particulier. Le sujet de la graduation est ô combien délicat puisqu’en dépend fortement la cote. Les subjectivités de l’acheteur et du vendeur doivent désormais faire place à des critères rationnels et factuels.
À chaque chapitre est associée une couleur, qui plus est, visible depuis la tranche. Votre domaine de collection est celui des monnaies de Charles X ? Vous aurez donc besoin de consulter très régulièrement ce chapitre. La couleur qui lui est associée deviendra un réflexe et vous pourrez y accéder plus rapidement via le repère de la tranche.
Dans la deuxième partie de chacun des chapitres, chaque type monétaire possède un bandeau récapitulant ses caractéristiques : graveur, composition, date de création, poids, diamètre, tirage global… Quand l’information a été retrouvée dans les archives, nous indiquons également le nombre de coins fournis pour cette production.
Pour chaque type, on trouvera le tableau habituel avec les lignes de cotes. Celles-ci sont quasiment identiques à celles du FRANC poche moyennant les corrections des quelques erreurs relevées. Une réactualisation importante a néanmoins été apportée aux cotes des monnaies commémoratives non circulantes de la Ve République dont le dernier recensement datait du FRANC V (2003).
LES NOUVEAUTÉS EN TERME DE LIGNES
Bien évidemment, comme à chaque nouvelle édition, de nouvelles lignes font leur apparition en fonction des découvertes. Et a contrario certaines disparaissent grâce à l’apport de nouvelles observations ou de requalifications.
La 5 Décimes Régénération Française passe de 1 à 4 lignes. Les Dupré cuivre et argent, comme à chaque édition, rassemblent le plus grand nombre de modifications. On y note 1 ajout pour la « Un Centime », 49 ajouts et 1 suppression pour la « Cinq Centimes » Dupré grand module, 16 ajouts et 1 suppression pour la « Un Décime » grand module, 9 ajouts et 1 suppression pour la « 5 Francs Union et Force ».
Concernant le différent « étoile » de Marseille, la distinction entre Sceau de Salomon et Molette est supprimée. Il s’agit du même poinçon dont l’insculpation est plus ou moins forte. 5 lignes sont ainsi supprimées : ¼ F An 12 MA, ½ F An 12 MA, 1 F An 12 MA, 1 F 1808 MA et 2 F 1808 MA. Une autre suppression concerne, elle, une différence de force d’insculpation du MA de Marseille (demi-franc 1811 MA).
L’apport des archives nous montre l’impossibilité des lignes 2 F 1806 MA et 2 F 1806 W qui sont de fait supprimées.
La 5 Francs An 12 A avec un grènetis particulier a été requalifiée grâce aux archives comme une frappe d’épreuve en virole pour le concours sur l’amélioration du monnayage. Un nouveau type a été créé et la ligne y a été déplacée.
Pour Louis XVIII, on note l’apparition d’une 5 Francs sans tête de cheval. Pour Charles X, trois nouvelles variantes font leur entrée : 1 F 1827 T 4 feuilles, 1 F 1828 D 4 feuilles et 1 F 1828/7 W 5 feuilles.
Pour Louis-Philippe, outre la découverte d’une ½ Franc 1832/1 A, c’est surtout l’introduction d’un nouveau type et de la ligne associée qui retient l’attention : 5 F Galle.
Sous la IIe République, l’examen des archives nous démontre l’existence d’une 20 Francs Louis-Napoléon avec une tranche particulière utilisant des têtes d’aigle comme séparateurs. Un exemplaire survivant reste à découvrir pour confirmation.
Pour Napoléon III, la ligne de la 5 Francs argent 1869 petits BB est supprimée. Il ne s’agit pas de l’emploi de poinçons prévus pour un module plus petit, mais d’une légère différence dans l’enfoncement du poinçon.
L’étude des archives nous a montré que l’existence d’une variante de la 5 Francs Camélinat avec la tranche « Travail - Garantie Nationale » était possible à défaut d’être certaine. Nous n’attendons pas de certitude pour l’introduire afin de pousser à l’examen systématique de la tranche des exemplaires de la « Camélinat ».
Deux mystères de la numismatique française moderne, la 25 Centimes Lindauer 1935 et la 20 Francs Turin 1932, sont enfin éclaircis grâce aux archives. Les lignes associées font donc leur apparition ou réapparition.
D’autres documents nous montrent que certaines 100 Francs 1935 et 1936 ont été frappées en flan bruni. Aussi deux nouvelles lignes sont créées.
Pour le régime de Vichy, les archives apportent un sens à la présence ou non du souligné sous Cmes et des points autour de 1941. Il s’agit d’un code pour repérer des variations de composition du zinc. La combinaison sans soulignement mais avec point n’est pas possible du point de vue des archives. Son existence était déjà douteuse dans les versions précédentes, sa ligne est dorénavant supprimée. Par ailleurs, des exemplaires de la 50 Centimes 1942 et de la 1 Franc 1942, présentent une croix en relief sur les deux globules entourant la légende « PATRIE ». Les archives ont permis d’y apporter une signification (test de frappe à échelle industrielle) et un tirage. Les deux lignes ont été créées.
Sous la IVe République, une nouvelle ligne est créée pour la combinaison « hybride » entre la matrice d’avers de la 10 F Turin « petite tête » et celle du revers de la « grosse tête ».
Aucune information d’archives n’est venue éclairer l’existence de la 100 Francs Cochet 1959. Elle fait néanmoins son apparition dans l’ouvrage.
Plusieurs lignes ont été créées dans les versions précédentes du FRANC alors qu’il ne s’agit pas de variations de gravure mais de cassures de coins. Celles-ci sont normalement hors du périmètre du livre (voir ci-après). Nous ne les avons pas supprimées de cette édition mais nous avons ajouté une icône de « porte de sortie » indiquant qu’elles sont vouées à disparaître lors d’une prochaine édition. Cette indication est également portée sur un certain nombre de lignes constituées par des variations très mineures de gravure sur un coin ou une matrice, introduites un peu rapidement sans vérification d’un intérêt manifeste des collectionneurs.
La distinction des tranches en creux A et B de différentes monnaies de 10 Francs de la Ve République a, elle, été directement supprimée. La fabrication de ces tranches en creux étant préalable à la frappe, ces variations de tranche se présentent à proportion égale. Il n’y a aucun intérêt à les coter séparément, à l’instar de toutes les frappes antérieures à 1830.
Nous espérons que vous aurez autant de plaisir à lire cet ouvrage que nous en avons eu à l’écrire. Nous tenons à remercier les membres de notre association qui ont donné de leur temps pour aider les auteurs dans la réalisation de ce projet. Nous pensons tout particulièrement à Laurent Schmitt, Stéphane Monneau, Jean-Philippe Marie, Jean-Baptiste Storz, Christian Gor, Marc Bazoge, Alain Maes, Arnaud Clairand, Laurent Voitel et François Sikner.
Nous remercions chaleureusement les numismates professionnels qui ont autorisé la publication de leurs photos : CGB, DNW, Fritz Rudolf Künker GmbH & Co. KG, Gonçalves Lobo, Heidelberg Münzhandlung Herbert Grün e.K, Heritage, Hess Divo, John Kraljevich Americana, Maison, Palombo, MDC Monaco, Monnaies d’Antan, NumisCorner.fr, Stack’s Bowers, Teutoburger Muenzauktion GmbH, www.gadoury.com, www.patrickguillard.com, www.saivenumismatique.fr.
Cet ouvrage repose pour beaucoup sur les archives de la Monnaie de Paris : nous remercions tout particulièrement notre « guide » initial que fut Jean-Marie Darnis, conservateur des Archives (retraité) et également Jean-Luc Desnier, conservateur du musée (retraité), Jean-Luc Maréchal, graveur (retraité), Dominique Antérion, chargé de conservation du patrimoine et Victor Hundsbuckler, conservateur du patrimoine, responsable du musée et des collections.
Les archives de la Monnaie de Paris sont conservées désormais à Savigny-le-Temple au Service des archives économiques et financières du ministère de l’Économie et des Finances. Nous remercions Henri Massenet et l’ensemble des documentalistes qui nous ont toujours très bien reçus.
Nous ne saurions oublier dans nos remerciements Valérie Guillaume et Philippe Charnotet, respectivement directrice et responsable des collections numismatiques du musée Carnavalet-Histoire de Paris, Pierre-Marc Chantereau, conservateur du musée Oscar Roty, Jean-Yves Kind, archiviste, chargé des collections des monnaies à la Bibliothèque nationale de France, Thierry Sarmant, conservateur en chef du patrimoine au Service historique de la Défense du ministère des Armées, Catherine Roucairol (descendante du graveur Auguste-François Michaut) et Jean Lecompte (auteur de l’ouvrage de référence sur les monnaies coloniales françaises).
Enfin, la qualité de l’ouvrage doit beaucoup à l’infographie d’Eric Prignac et au travail d’édition de CGB piloté par Joël Cornu.
Philipe THÉRET (ADF 481),
Xavier BOURBON (ADF 628),
Christophe CHARVE (ADF 286)
& Franck PERRIN (ADF 626).
lefranclesarchives@amisdufranc.org
