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CHARLES DE LIÈGE | 28/02/2021 Informations Eginhard écrit : Charles était robuste et d’une taille élevée, bien qu’elle n’excédât pas de justes proportions, car il mesurait sept fois la longueur de son pied. Il avait le sommet du front arrondi, les yeux grands et vifs, le nez plutôt grand, une chevelure abondante, le visage vermeil et allègre. Toute sa personne avait une prestance et une dignité qui imposaient. Sobre dans le boire et le manger, il répugnait à l’ivresse et rarement, sur sa table, figuraient plus de quatre plats. Il ne tenait pas au luxe des vêtements et il affectionnait le costume simple et martial des Francs. Sa santé était robuste, cependant, durant les quatre dernières années de sa vie, il fut fréquemment atteint de la fièvre et il finit par boiter légèrement d’un pied. Remarquons en effet, que ce sont des rhumatismes, qui devinrent à la fin de sa vie quasi permanents, qui inclineront Charles à choisir les eaux thermales bienfaitrices d’Aix-la-Chapelle pour établir en cet endroit un palais permanent, plutôt qu’à Liège où avait vécu sa famille. Mais Aix, qui deviendra la capitale de l’Empire et la ville du couronnement était située alors dans les limites du diocèse de Liège. Mais de sa naissance, nous ne savons rien… On peut produire une thèse, un essai, un roman, ce travail est un article malhonnête. Je suis Liégeois, donc une forte et intense conviction nourrit mon cœur et mon esprit. Je sais où est né Charlemagne. Le Liégeois ne peut pas prouver ce qu’il prétend, parce que sa légitimité se trouvait dans les librairies des monastères de St-Lambert et de St-Pierre, dévastées par les Normands en janvier 882. Le feu en 1183 transforme en cendres ce qu’il restait de ses lettres de noblesse. Tout périt, les vieux cartulaires, les vieilles chroniques, les diplômes… On sauva à grand-peine quelques diplômes des empereurs des Xe et XIe siècles. On aura chanté la naissance de Charles de la forêt de Samoussy près de Laon, à Quierzy-sur-Oise, à Ingelheim am Rhein, à Prüm, à Aix-la-Chapelle, à Paris, à Herstal, à Jupille… En fait que veut-on savoir ? et pourquoi doit-on le savoir ? Charles était-il français ou allemand ? Les nations se sont emparées de l’Histoire pour s’attribuer la gloire des grands personnages. En Allemagne on avait fait de Karl der Große un Allemand avant la lettre. En France l’historien Ferdinand LOT écrivait : « Charlemagne est français parce que nous l’avons adopté ». Maintenant, si les Belges s’en mêlent… alors, c’est bas possiible ! es ist nicht möglich !! ach so… Entre ces deux puissances parfois si belliqueuses le Pays de Liège sera resté timidement à l’écart, comme s’il avait moins de titres que les autres pour réclamer le grand homme. Mais, l’Histoire est une science, si elle est « nationale » elle devient propagande alors son souci n’est plus la vérité. Si nous disposions de leur carte d’identité, Moctezuma serait-il mexicain ? Lucy serait éthiopienne, l’Homme de Spy, belge ; Paris, Hector et Priam seraient turcs. Saint Nicolas, saint Patrick, sainte Lucie et saint Antoine feraient pleurer bien des dévots. Si nous devons évoquer Vercingétorix, Arminius ou Romulus, nos bannières vont commencer à se froisser. Cette approche de l’Histoire est ridicule, ces hommes appartenaient à leur temps et il nous appartient d’entendre, de comprendre ce qui peut nous enrichir et, si j’osais, ce qui peut contribuer à nous unir. Il est indéniable et inattaquable que le petit-fils de Charles Martel a très fortement marqué la culture liégeoise. C’est une évidence que le fils de Pépin III, dit le bref, a imprégné la vie de Liège d’une telle manière qu’il en est indissociable. Déjà au XVe siècle, des voyageurs rapportent dans leurs écrits les propos tenus par la population. En l’année 1460, on peut lire : « Chez les Liégeois, c’est une opinion générale que les ancêtres de Charlemagne sont originaires de Jupille, qui est dans le voisinage de la cité de Liège ». En 1567, on lit encore : « De la nation liégeoise sont sortis les princes Pépins, desquels est issu par suite le très glorieux Charlemagne ». En 1623, enfin : « Les ancêtres de Pépin et de Charlemagne sont nés dans le pays de Liège ». Ca radote, mais ça ne prouve rien. D’ailleurs pourquoi une croyance si forte n’est-elle pas plus répandue dans la grande « Histoire » ? Un avocat liégeois expliquait que c’était parce qu’elle n’avait pas eu l’honneur de figurer dans les fameux livres d’histoire ad usum scholarum. On ne sait, en vérité, que ce que l’on a appris. Res novoe, quia inauditoe. La famille de Charles, depuis au moins cinq générations avant sa naissance, avait planté ses racines en Pays de Liège. Elle y possédait d’immenses domaines, des manoirs célèbres comme ceux de Landen, de Chèvremont, d’Herstal, de Jupille. C’est le trisaïeul de Charlemagne qui a relevé et embelli le château-fort de Chèvremont ; c’est son père qui a reconstruit le manoir de Herstal en 758. Landen avait un palais où Pépin dit de Landen serait mort le 21 février 640. Le centre de leurs propriétés était Liège, où ils exerçaient les droits seigneuriaux en leur qualité de comtes de Tongres ou de Hesbaye. Nous savons vraiment très peu de chose sur les vingt-cinq premières années de Charles. Celui qui fera sa chronique est un proche. Il s’agit d’un enfant de Hesbaye élevé avec les fils de Charlemagne. Celui-ci en fera son secrétaire et le mariera probablement à une de ses nièces. Ce chroniqueur se nomme Einhard. Nous l’appelons Eginhard. Il ne rapporte rien sur la naissance et l’enfance de l’Empereur et commence son travail quand Charles devient roi. Mais, des propos qui lui sont attribués pourraient s’avérer fort intéressants : De cujus nativitate atque infancia, vel etiam pueritia, quia neque sicriptis. usquam aliquid declaratum est, neque quisquam modo superesse invenitur, qui horum se dicat habere notitiam, scriberei nueptum judicans, ad actus et mores ceterasque vitae illius partes explicandas ac demonstrandas, omissis incognitis, transire disposui. Que caches-tu ? un ogre, un bouilleur d’enfant ? Et si en réalité la naissance et les premières années de notre Charles étaient peu compatibles avec la dignité royale. On comprendrait alors la négligence protectrice, le silence politique du chroniqueur. Ainsi j’ai pu lire et je vous rapporte ces quelques lignes : Cette malheureuse jeune fille était donc née en 741. On peut penser que Charles devait avoir à peu près le même âge. Il serait né le 4 des nones d’avril, soit le 2 avril 742. On a beaucoup bataillé sur l’année de sa naissance mais officiellement il décède en 814 à l’âge de 72 ans ! Faites votre compte. Decessit anno aetatis suae LXXII, et ex : quo regnare coeperat XLVII, v kalend. februarii hora diei tertia. Même cette date de naissance n’est pas « catholique » et nécessitait d’être cachée puisque les parents de Charlemagne, Pépin le Bref et Berthe au Grand Pied se sont mariés en 744 ! L’Empereur défenseur de l’Eglise était né hors mariage… et de surcroit avait été un enfant illégitime ! En 2010, des légistes ont étudié la calotte crânienne de Charles et lui donnent 66 ans comme âge de décès. J’ai soumis cette information à un des meilleurs médecins légistes qui soit, mon ami le professeur Philippe BOXHO. Il m’explique que l’étude de la calotte crânienne basée sur l’aspect des sutures intra-crânienne n’est pas le moyen le plus fiable pour déterminer l’âge au moment du décès. Philippe estime que le degré d’incertitude est donc fort grand, il l’évalue à plus ou moins 10 ans dans le meilleur des cas… En 742, Pépin le Bref s’en alla faire la guerre à Hunald, duc des Aquitains. Presque toute la France ainsi que l’Allemagne s’étaient soulevées à la nouvelle de la mort de Charles-Martel, laquelle arriva inopinément le 22 octobre 741. Pépin dut faire une guerre d’extermination à ces peuples, qui combattaient pour leur nationalité. Pépin fut vainqueur après une campagne meurtrière. Mortuo Carolo duce, dit Einhart, Si, je dis bien « Si », Berthe était à ce moment enceinte, on peut raisonnablement douter qu’elle ait suivi son compagnon dans sa sanglante expédition sur les bords du Rhône et de la Loire et encore moins sur les terres des Saxons et des Bavarois. La « France » et l’« Allemagne » s’étant furieusement soulevées, la reine n’avait rien à faire sur ces territoires, et donc le petit Charles n’aurait pu y naître. Pour ce qui est de Paris, cette ville aurait perdu beaucoup de son importance politique sous le règne de Charlemagne. Paris n’est certainement pas sa ville chérie. Les historiens font remarquer que « c’était en Pays de Liège que se réunissaient (au VIIIe siècle) tous les ambitieux, tous les hommes en pouvoir, tous les lettrés qu’attiraient les bienfaits de la cour, tous les marchands que nourrissait son luxe. La ville de Paris ne se trouverait pas même nommée par les historiens français durant le long règne de Charlemagne. » (Histoire des Français, t. Il, p. 368.). Où serait né Charles ? Un moine bénédictin de l’abbaye de Saint-Gall qui avait voyagé, écrivait une soixantaine d’années après la mort de Charlemagne, les lignes suivantes : Cum strenuissimus imperator Karolus aliquam requiem habere potuisset, non otio torpere, sed divinis servitiis voluit insudare, adeo, ut in genitali solo basilicam antiquis Romanorum operibus proestantiorem fabricare propria dispositione molitus, in brevi compotem se voti sui gauderet. Dans son « pays natal-genitali solo », ces quelques mots qui apparaissent négligemment, en sincérité évoquent la terre natale de Charles. La basilique en question est l’église d’Aix dont les travaux commenceront aux alentours de 794. À cette époque, la ville d’Aix formait un district du Pays de Liège. Selon Besselius, en 870 Aix était encore une enclave du Pays de Liège. In hoc autem Pago Leodiensi minores pagi, vel, sicut in superiore divisionis formulâ nominantur, districtus, Aquensis circa Aquisgranum (vulgo Achen)… comprehendebantur. (Chronicon Gottwicense, t. Il, p. 656). Ce n’est qu’à la fin du IXe siècle qu’Aix fut constituée en ville libre et indépendante, sous la protection immédiate des Empereurs. Elle demeura néanmoins enclavée dans le diocèse de Liège ; et jusqu’en 1794 le clergé aixois reconnut constamment notre cité pour mère-patrie. Mais, Aix n’est mentionnée pour la première fois qu’en l’an 766, quand Pépin, souffrant, alla y passer deux mois pour prendre des bains. Donc Charles n’y serait pas né précisément mais nous sommes clairement sur ses terres natales en Pays de Liège. Faut-il que tout ceci soit vrai ? Durant un long et triste hiver, Charles guerroyait en Saxe. Pris de nostalgie, il rêve de sa terre natale, de son enfance. Pris par l’émotion il fait bâtir, à l’endroit même, sur le plan du manoir paternel, un château-fort auquel il donne une douce appellation, celle de Herstal. Saxoniam petiit, castrisque super Wïmram poIitis consedit, et locum castrorum Heristelli vocari jussit Madame Estelle Florani, architecte, nous fait remarquer dans son excellent travail : CHARLEMAGNE Aux origines du Palais de Liège, que si le palais d’Aix a effectivement été bâti sur les plans de Charlemagne, celui-ci a dû s’inspirer d’un palais qui lui était familier. Selon elle, les palais de Liège et d’Aix posséderaient une structure commune. La famille de Charles trouvera en Liège quelques fameux chevaliers pour la servir. Ogier-le-Danois, en fait l’Ardanois, peut-être Aymon et ses fils et un certain Roland. Ce dernier aurait été apparenté à notre Charles, on raconte qu’il était le fils d’une de ses sœurs naturelles. Il sera comte palatin à la cour de Herstal, gouverneur des pays de la Belgique baignés par l’Océan. Le preux Roland s’illustre à la bataille de Roncevaux où il succombe le 15 juin 778. Son Oncle, notre Charles, ramène à Liège son cor d’ivoire et son épée, la fameuse Durandal. Ces deux précieuses reliques furent déposées, en ex-voto, dans le chœur d’une église de Liège. in coenobio quodam Leodiensi. Je voudrais m’attarder quelques lignes sur la mère de Charles, Berthe au Grand Pied ou Bertrade de Laon. L’histoire nous la ferait venir de France. Pourtant, une rumeur, un bruit persistant la font naître Liégeoise. Berthe est fille « Cariberti Laudunensis comitis ». Copié, traduit, transporté, « Laudunensis » pourrait se lire Leodiensis. D’autant que sur le monnayage carolingien, Laon apparait sous la titulature de Lugduni clavati… (mais aussi LAVDVN). Quand dès le Xe siècle le Liégeois est appelé dans certains textes Laudociensis et Laudovicensis, la confusion devient plus manifeste. Ainsi Bertrade fille du Leude Héribert de Jupille pouvait être une valeureuse liégeoise. Le Leude dites-vous ? Laissez-moi m’amuser encore. Il se trouve sur le parvis de Notre-Dame à Paris une statue en Bronze de Charlemagne moins belle que la nôtre. En France on l’appelle Charlemagne et ses leudes… Les leudes seraient les vassaux, les écuyers, les gens liés par serment… dans ce cas, il s’agirait d’un personnage de fiction, Olivier et de notre Roland désormais national. Le mot se retrouve en bas latin, en francique, en vieux patois germanique : Leudes, Leute, Leudi, Liuti, Lutti, Leodi, Léode, Lüttich en Allemagne c’est Liège et « Leod » c’est nous ! À Paris, sur le parvis de Notre-Dame se trouve Charlemagne et ses Liégeois… Il existe une histoire particulière, intime, entre Liège et Charlemagne, Charles choisit la Liégeoise Ermengarde de Hesbaye pour qu’elle devienne la reine de son fils Louis le Pieux. Lui-même avait amené son épouse Fastrade à Liège après son mariage en 783 et les amoureux avaient séjourné sur nos terres tout l’hiver. À la mort de son père, en 768, Charles, avec son frère Carloman devient roi des Francs. Cette année-là il fête Pâques, l’évènement le plus important pour les chrétiens à Aix. L’année suivante ce sera à Liège. Pardonnez-moi cette lourde énumération de dates, mais en 770, en 771, en 772, en 773, en 776, en 777, en 778, en 779, en 782, en 783, en 798 Charles passe l’hiver en Pays de Liège, et chaque fois Noël et Pâques sous les cloches de la cathédrale Saint-Lambert. En 774, il défait le roi des Lombards Didier qu’il exile avec sa famille en nos contrées. De 799 à 814 il reste sur nos terres. Même s’il s’établit à Aix, c’est pourtant encore à Liège en 806 qu’il viendrait partager ses états entre ses fils. …Carolus celebravit pascha apud Sanctum Lambertum in vico Leodico; - At rex de Heristallio ubi hiemeverit et ubi natalem Domini ac sanctum pascha celebraverat…; -lndè in Franciam reversus, in villa Heristallio et natalem Domini et sanctam paschalis festi solemnitam celebravit, … L’empreinte de Charles sur Liège est phénoménale. S’il se trouve quelques vérités dans ces éléments rapportés alors Charles ne fut pas seulement le fils de Liège, il en fut aussi le parrain… On lui attribue l’organisation du diocèse de Liège par l’institution des archidiaconats et des conciles. Il fonde les églises de Notre-Dame à Aix, de Notre-Dame à Tongres, de St-Martin à Visé, de St-Martin d’Avroi. Il crée quinze prébendes à Huy. Il confère à sa chère citée un diplôme, scellé d’un sceau d’or. Dans cet acte, perdu aujourd’hui, il confirmait aux Liégeois leurs franchises et les déclarait les plus nobles citoyens de ses États. Ils exemptait de taille et de service militaire tous les Liégeois, et il leur permettait de porter les vêtements et les ornements qui leur plaisaient. Charles a offert à la ville une magnifique bannière de satin blanc, carrée, bordée d’une frange d’argent. Cette bannière devint célèbre dans notre histoire sous le nom d’Etendard de St-Lambert. Elle fut ainsi nommée parce qu’on la gardait dans le trésor de la cathédrale. Il octroie des prérogatives à nos évêques, et, entre autres, celle de sacrer les empereurs en l’absence du métropolitain, l’archevêque de Cologne. Selon le désir de Charlemagne, Liège a le statut de « ville libre », vicus publicus, cela signifie qu’elle ne relevait que du roi. Charles est l’ami du peuple et du Liégeois, il voulait que dans son bon pays pauvre homme en sa maison fût roi. Cet anoblissement des Liégeois produisit dans tous les rangs une fierté qui déplaisait extrêmement aux étrangers. « Je ne connois point de Peuple plus fier de son origine que les habitants de cette capitale : ils font remonter leur noblesse au delà du règne de Charlemagne, et se disent tous seigneur, et barons de la façon de cet empereur. » (De la Porte, Le Voyageur François, Paris, 1775, t. XX, p. 369, etc.) Si nous pouvons maintenant raisonnablement nous entendre sur le fait de la naissance de Charlemagne dans notre pays, il est plus ardu de déterminer le lieu précis - Liège, Herstal, Jupille ou Aix ? Je ne retiens pas Aix, les bâtiments les plus récents ont été élevés par l’Empereur dès 781 ; ni Jupille dont le palais n’était plus visité que rarement par les membres de la famille carolingienne, depuis que Pépin le Gros y était décédé dans un contexte difficile ; ni Herstal, manoir sombre et antique. Pépin de Herstal, l’arrière-grand-père de Charles, avait commandé à la fin de son règne, aux environs de 720, la construction d’un beau château en place de Liège. Ce palais devait être le plus moderne pour qu’on le destine à la visite des papes et des rois en terre de Liège. En 742, cet endroit est le plus propice pour recevoir la compagne du roi enceinte et sa cour… Liège n’existe que depuis 980. Comment imaginer une ville, un palais royal, presque une capitale d’empire en un lieu qui nous est si cher et qui ne se souvient de rien ? Charles Piot, historien, archéologue, archiviste et numismate belge, du XIXe siècle, écrivait : la numismatique n’est pas une marotte, un simple amusement, comme le vulgaire se l’imagine, mais une science qui, envisagée à un point de vue plus élevé, peut rendre parfois des services réels dans les questions les plus épineuses d’histoire, d’archéologie et de géographie. Il avait proposé l’étude d’un denier de Charlemagne qui avait très probablement été émis à Liège. Voici un denier d’argent. Au droit on lit en deux lignes : CARo LVS avec un grènetis au pourtour. Au revers on lit en deux lignes : LEo DICo. Au centre un globule. Le L de LEODICO porte une forme très caractéristique, le bas de la lettre L est bifurqué en deux parties très distinctes. Grènetis au pourtour. La masse est de plus ou moins 1g pour près de 17mm de diamètre. Cette monnaie est très rare, on en connaîtrait trois exemplaires ; un se trouve au Cabinet de France dont on ne connaît pas l’origine. Un autre a été déterré à Dombourg en 1896. Cette particularité de la forme bifurquée du bas de la lettre L paraît propre à l’atelier de Liège à cette époque. CAROLUS est bien sur Charlemagne et LEODICO renvoie vers Liège. Ce denier serait dans un premier temps la plus ancienne monnaie liégeoise connue. Charles a donc fait battre monnaie à Liège. Nous savons grossièrement que pour Charlemagne il existe deux types de deniers. Les deniers au premier type portent sur le droit CARO LUS en deux lignes. Ces deniers ont été émis avant la réforme, le capitulaire de 781, et forcément depuis 768, date du couronnement de Charles comme roi des Francs. Aux environs de 781, Charles modifie la masse et le type des deniers. Les nouveaux deniers portent au centre, d’un côté, le monogramme royal entouré du nom de la ville (AGEN dans cet exemple), et de l’autre côté, la légende CARLVS REX FR autour d’une croix. Exceptionnellement, le nom du roi peut entourer le monogramme. Les deniers portant le nom de Karolus, suivi du qualificatif imperator, sont très rares et sont généralement dépourvus d’indications topographiques.
Rappelons que dès 781, le roi des Francs réforme le système monétaire. Il abandonne le solidus d’or et base son monnayage sur l’argent. L’unité en sera la livre divisée en vingt sous. Chaque sou valant douze deniers. Seuls les deniers sont des monnaies réelles : le sou et la livre ne servent que comme monnaies de compte. Nous savons qu’en 769 Charles célèbre Pâques à Liège dans la cathédrale Saint-Lambert. On pense que ce serait à cette occasion que ce denier aurait été produit. Il existerait donc un atelier monétaire à Liège en 769. On apprend que la race mérovingienne ne battait monnaie, en Belgique, que dans des établissements d’origine romaine. Les Mérovingiens auraient battu monnaie à Liège comme ils l’avaient fait à Maastricht, à Jupille, à Huy, à Namur et à Dinant et Charles n’aurait fait que suivre l’antique usage… Nous dirions autrement que là où les Carolingiens frappèrent monnaie, les Mérovingiens en avaient fait de même antérieurement. Nous avons déjà évoqué l’élévation d’un palais à Liège, mais sur le plan numismatique si nous entendons que Charles n’autorise la frappe de monnaie que dans ses palais c’est qu’il existe bel et bien un palais à Liège en 769. Cette monnaie nous parle. Elle nous donne à réfléchir sur des notions que notre esprit principautaire n’a pas encore osé complètement appréhender. Notre pays a une origine romaine, en 769 il dispose clairement d’un atelier monétaire et donc d’un palais (un palais royal appartenant au fisc ). À la même époque, Liège dispose d’un marché et d’un statut de « ville ». Sous les Carolingiens, là où il y a un atelier monétaire, il y a un marché : l’un entraîne nécessairement l’autre. Charles aurait concédé toutes ces prérogatives à sa terre natale, à moins que certaines n’existassent déjà avant sa naissance. Dès le premier siècle, il existe en plein cœur de Liège une très grande villa romaine qui sera habitée jusqu’au haut Moyen Âge. Dès le VIe siècle, saint Monulphe fait construire à Liège une chapelle dédiée aux saints Côme et Damien. Liège venait donc à peine de naître lorsque Charlemagne vit le jour. Usuard, un moine bénédictin de l’abbaye Saint-Germain-des-Prés et lettré du IXe siècle, écrivait vers l’an 830 que saint Théodard avait été enterré, en 673, in Legia villa publica. Or, villa publica est synonyme de villa regia, résidence royale. Dans ces temps reculés, la cité proprement dite était enfermée dans une enceinte formant un carré irrégulier, qui embrassait le palais et marché actuels, l’église de Saint-Lambert, divers édifices publics et nombre de rues étroites. Cette enceinte était percée de trois portes. Je vais étendre ce chapitre tant il pourrait intéresser mes compatriotes. Cette première enceinte de notre ville longeait la rue Haute-Sauvenière, suivait le rivage de la Meuse (la place de la République française actuelle, anciennement la place des Chevaux), la rue du Dragon-d’Or, la rue Sur-Meuse, les rues Derrière-St-Georges et Grasse-Poule, et de là remontait jusqu’à la Haute-Sauvenière. La reconstruction de cette enceinte fut faite par saint Hubert sous l’égide des Carolingiens. Il y avait dans cette enceinte trois châteaux qui avaient été rebâtis par Charles Martel vers l’an 725. L’un, situé rue Féronstrée, était la résidence de l’évêque de Liège ; le deuxième, en haut de la rue Haute-Sauvenière, était occupé par l’advoué de Liège et ses gardes ; le troisième, le principal, situé vis-à-vis de la cathédrale, était habité par les membres de la famille royale. C’est ce dernier château qui a conservé exclusivement le nom de palais. Et ce palais, qui fut ensuite occupé et restauré par nos anciens princes, n’est autre que notre palais actuel. Charles erre en Pays de Liège depuis plus de mille ans. Il est attaché à sa ville par une mémoire rémanente. Ce qui aurait fait l’histoire et la légitimité d’un peuple n’est plus que cendres. Un feu enragé a transformé ce qui était écrit et scellé, en légende, faisant du Pays de Liège une terre fantastique qui pouvait entrer dans les chansons de geste, dans les contes, et dans la mémoire des anciens. Charles aimait Liège, de toutes les manières le Pays de Liège l’aura vu naître, vivre et mourir. De cette terre, fille de Rome, fleur des trois Gaules, Athènes du Nord, Mère de l’Europe, Charlemagne est le plus illustre de ses enfants, et chaque Liégeois sait que Charles est de Liège. Vous comptez sur votre naissance et vous en concevez de l’orgueil ! Sachez que vous n’aurez ni gouvernement ni évêchés si vous n’êtes pas plus instruits que les autres. À Ferdinand Henaut et à Charles Piot. A. SFERRAZZA REMERCIEMENTS SOURCES IMAGES |
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