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CGB Live Auction Mars 2021 : l'ecu Louis XIV 1672 Saint-Palais

| 03/03/2021
Informations

 

UN NEUVIÈME ET BEL EXEMPLAIRE DE L’ÉCU DE LOUIS XIV,
DIT « À LA CRAVATE », FRAPPÉ À SAINT-PALAIS EN 1672

Peu avant sa mort, survenue en août 1672, Jean Warin grave pour deux ateliers, Paris et Toulouse, un nouveau poinçon d’effigie pour les écus de 60 sols, inspiré du portrait qu’il avait déjà introduit sur des jetons depuis plusieurs années à l’occasion de la guerre dite « de Dévolution » (1667-1668) terminée par la paix d’Aix-la-Chapelle en 1668.

Ce portrait est celui de Louis XIV en tenue militaire de son temps, en uniforme de général en campagne, portant la cuirasse, au-dessus de laquelle sort une cravate entourant le cou. Ce portrait rompait avec les effigies précédentes de Louis XIV inspirées de l’Antiquité. Il est dit « à la cravate » avec juste raison car l’inventaire effectué après le décès de Jean Warin fait état de carrés montrant le portrait du roi « avec une cravate ».

Warin introduisit ce nouveau portrait après le 6 avril 1672, date de l’entrée en guerre de la France contre la Hollande. Jusqu’alors il avait encore gravé des effigies de pièces de 30 sols millésimées 1672 avec un portrait dit « juvénile » révisé en 1670. Mais l’adoption du portrait guerrier, jusqu’alors limité aux jetons, devenait particulièrement opportune après cette nouvelle entrée en guerre qui, pensait-on alors, consacrerait un nouveau triomphe militaire de Louis XIV. En 1668, un essai avait déjà été réalisé, avec le portrait militaire des jetons, mais il était resté sans suite.

On n’a pas encore retrouvé un seul exemplaire des pièces de 60 sols frappées à Paris avec le nouveau portrait de Jean Warin dit « à la cravate » en 1672. Tous les exemplaires jusqu’à présent retrouvés avec ce millésime ont été gravés après la mort de Warin par Dufour commis à cet effet par la Cour des monnaies.

Le 4 août 1672, quelques jours seulement avant sa mort, Warin déposa au greffe de la Cour des monnaies un poinçon d’effigie pour les pièces de 60 sols destinées à la Monnaie de Toulouse. Celle-ci avait été rouverte en 1666 dans le cadre de la régie générale de Claude Thomas. Toutefois, cet atelier ne frappait pas de monnaies d’or ni de pièce de 60 sols, sans doute en l’absence d’un balancier suffisamment puissant pour pouvoir frapper cette espèce d’environ 27 grammes.

Puisque la Monnaie de Toulouse n’avait pas l’usage possible de ce poinçon d’effigie et qu’elle avait des relations avec les ateliers béarnais évoquées en 1893 par Adrien Blanchet dans son Histoire monétaire de Béarn, j’ai formulé en 1994 au Journées numismatiques de Toulouse l’hypothèse, non démentie depuis, selon laquelle ce poinçon aurait été transmis par la Monnaie de Toulouse à celle de Saint-Palais en vue de frapper l’écu de 60 sols dit «  la cravatée (BSFN, juin 1994, p. 888-892).

À l’époque, l’atelier de Saint-Palais ne frappait que des pièces de 60 sols. Françoise Dumas, dans son étude toujours valable sur les monnaies béarnaises (RN 1959-1960, p. 297-334), indique p. 305 qu’en décembre 1671 « une enquête fut menée sur quelques justes soupçons de fausse monnaie fabriquée dans la Monnaie de Saint-Palais et amena la saisie d’une partie du matériel ». Il est alors possible que les poinçons d’effigie du roi ou les carrés frappés avec ces poinçons aient été enlevés de l’atelier, d’où la nécessité de disposer de nouveaux poinçons pour reprendre la frappe de la pièce de 60 sols.

Quand on examine bien l’écu de Saint-Palais « à la cravate » millésime 1672, on s’aperçoit que non seulement le portait est nouveau mais aussi l’écusson du revers. En effet, il montre les armes de Navarre sous la forme de chaînes réunies alors que l’habitude avait été prise depuis des années de remplacer ces chaînes par de simples points fermés tandis que les chaînes montrent des annelets ouverts. L’écu de 1672 est donc une pièce totalement nouvelle par rapport aux précédents écus frappés à Saint-Palais depuis 1652. Le blason lui-même est un peu différent de celui des écus précédents frappés de 1667 à 1671 et le millésime 1672 est placé avec difficulté, avec des poinçons de chiffres différents de ceux utilisés pour les millésimes précédents 1670 et 1671. Enfin, un différent inédit, que j’ai déjà signalé, à savoir un soleil, apparaît au-dessus du portrait de Louis XIV alors qu’il est absent des exemplaires 1667-1671. Je pense que ce soleil est le différent du graveur auquel on doit la réalisation de cet écu à la cravate 1672 et que ce graveur était local du fait qu’il savait que l’écu de Navarre était constitué de chaînes et non de points, comme un usage récent l’avait établi.

Dans ces conditions, tout en conservant l’hypothèse du poinçon d’effigie venu de Toulouse, nous ne pouvons pas écarter une fourniture directe d’un nouveau poinçon d’effigie à Saint-Palais par Warin, opération non inscrite au registre de la Cour des monnaies des poinçons et matrices déposés au greffe, du fait du statut particulier des ateliers béarnais. En revanche, à cause de la présence des chaînes, je ne pense pas que l’écusson du revers ait été fourni par Warin mais qu’il est le résultat d’un travail local.

Selon Fernand Arbez (RN 1996, p. 299-300), 29 651 exemplaires ont été frappés pour un poids total de 3 296 marcs 1 once 21 deniers1. Sur ces 29 651 exemplaires, 8 seulement avaient été retrouvés à la date de février 2014 quand j’ai publié dans le BSFN avec Emmanuel Henry le recensement des exemplaires aujourd’hui existants (BSFN, février 2014, p. 58-61), ce recensement complétant notre communication du 30 mars 2013 (BSFN, avril 2013, p. 80-82), laquelle avait pris par référence la communication précitée de juin 1994. Emmanuel et moi-même avions alors communiqué le pedigree de ces 8 exemplaires alors connus, dont nous avions localisé tous les propriétaires actuels, sauf l’un d’entre eux. L’un de ces propriétaires appelé alors « le collectionneur du Nord » était Jocelyn Dezitter, aujourd’hui décédé.

Le 9e exemplaire récemment découvert est proposé par CGB.fr dans sa Live Auction du 9 mars 2021 (bry_647451). Il provient de la vente aux enchères Millon réalisée à Nice le 22 octobre 2020, n° 137. Ayant eu en mains les huit autres, dont les deux plus beaux connus, celui de la collection abbé Jacques Thiliez récemment décédé provenant des anciennes collections Barbier (vente 1936) et Montalant (vente Vinchon 1977), ainsi que celui de la collection Max Allard (vente Burgan 1996, ancienne vente Schulman, peut-être collection Paul de Baecke), celui-ci me paraît au moins équivalent sinon de meilleure qualité, tant au droit qu’au revers, le revers étant moins beau sur ces deux exemplaires Thilliez et Allard. J’exprime donc une préférence pour celui-ci qui est très bien conservé dans son ensemble, notamment en ce qui concerne le portrait de Louis XIV. La pièce présente un petit défaut de flan, dû au découpage2. Ce défaut est courant sur les monnaies de la même époque frappées dans les trois ateliers béarnais de Pau, Morlaàs et Saint-Palais. Il n’est donc pas rédhibitoire.

Christian CHARLET

1 - Information d’Arnaud Clairand.
2 - Écu présentant de petits coups sur la tranche.

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