20 FRANCS OR MARIANNE COQ

20 FRANCS OR MARIANNE COQ :
À PROPOS DE LA VARIÉTÉ LONGUE QUEUE

Les informations à propos de cette variété étant rares, éparses et difficiles à trouver, il est peut-être utile de rappeler à quoi elle correspond.

Le fier coq gaulois qui orne le revers de la pièce de 20 francs or gravée par J.C. Chaplain est paré d’un superbe plumage et il exhibe, à la droite de la pièce, une magnifique queue faite de grandes plumes arquées en faucilles dont la partie inférieure vient surplomber l’inscription « Fcs ».

Un examen attentif de nombreuses pièces montre que l’extrémité effilée de la plume la plus proche de la barre horizontale supérieure du F n’a pas toujours exactement la même longueur.

Le plus souvent, elle ne dépasse pas cette barre horizontale : c’est de loin le type le plus courant.

Mais, parfois, elle la dépasse : c’est la variété dite « à longue queue ».

Mais avant de poursuivre plus en avant la discussion à propos de cette variété, il convient de rappeler qu’elle ressemble beaucoup à l’aspect de la même plume présente sur toutes les pièces de 10 francs or Marianne Coq. La seule différence est que, pour cette dernière, il s’agit de la gravure normale et non d’une variété (ci-dessous au millésime 1914) :

Mais revenons à la pièce de 20 francs.

Le fait intrigant de cette variété, c’est que la pointe de la plume qui dépasse n’a pas toujours la même longueur, tantôt minime, tantôt nettement plus allongée comme illustré ci-dessous :

Si l’existence de cette variété est attestée dans la littérature spécialisée, sa signification reste mystérieuse et ne fait pas consensus.

Ainsi, dans les ouvrages Le Franc Les monnaies 2014 (page 608) et Le Franc Les monnaies Les archives 2019 (page 778), c’est l’hypothèse d’une éventuelle contrefaçon qui est soulevée à son encontre. Ces deux livres rapportent en effet que, dans les années 70, la variété avait été détectée sur des pièces présentant par ailleurs les caractéristiques des refrappes Pinay ce qui, à l’époque, avait déclenché une enquête d’experts de La Monnaie de Paris (suspicion d’emploi de coins non originaux pour les refrappes Pinay). Toutefois, les investigations entreprises n’avaient pas permis de conclure avec certitude.

Pour d’autres auteurs, cette variété serait une marque secrète de l’Administration afin de pouvoir différencier les refrappes Pinay des frappes d’origine.

Ainsi, dans la défunte revue Numismatique et Change (page 41 du numéro 353 d’octobre 2004), Frédéric Droulers avait publié un excellent article abordant cette controverse : le lecteur s’y reportera avec bonheur. Il y rapportait notamment le témoignage de Jean-Claude Dieudonné, ancien maître-graveur à La Monnaie selon qui l’hypothèse d’une marque secrète de l’Administration ne tient pas car « la variété à très longue queue existe également en frappe d’époque de 1907, 1908 et 1911 (sic) ».

Pour notre part, nous ajouterons que chacun peut constater que nombre des pièces millésimées 1899 présentent nativement une longue queue. Et bien entendu, avec un tel millésime, il ne peut pas s’agir d’une refrappe Pinay…

Pour objectiver et quantifier plus facilement le dépassement de la barre horizontale supérieure du F, on peut s’aider d’un repérage géométrique. Cela a également pour intérêt de montrer que c’est bien l’extrémité de la plume qui s’allonge vers la droite et non le F qui se déplace vers la gauche.

Pour cela, on a besoin d’un repère fixe et d’un repère mobile. Il suffit ensuite d’observer la variation de l’écartement entre les deux.

Ci-dessous, le repère fixe est un trait noir vertical qui longe le côté vertical du F. Quant au repère mobile, c’est un triangle rectangle rouge dont le côté vertical passe exactement par la pointe effilée de la plume.

Et enfin, on matérialise l’écartement entre les deux repères par une double flèche bleue horizontale (celle-ci est bien entendu de longueur identique pour les quatre photos).

On constate que c’est bien le triangle rouge qui s’éloigne du repère fixe.

Une autre façon de mettre en évidence l’allongement de la plume est de regarder l’éloignement progressif du trait vertical rouge par rapport au creux du C :

CONCLUSION

À ce jour, il n’y a pas d’explication claire et univoque quant à l’origine et la signification de la variété dite « à queue longue » de la 20 francs or Marianne Coq.

Toutefois, comme son existence n’est pas niée dans la littérature spécialisée, on peut malgré tout :

- rappeler ses principales caractéristiques physiques ;

- souligner que son polymorphisme (queue plus ou moins longue) est dû à la variation de longueur de la partie de la plume qui dépasse la barre horizontale supérieure du F de « Fcs ».

Jean-Luc GRIPPARI