Nantes le 8 août 1518 : la ville est en liesse car elle accueille « la joyeuse venue et entrée des Roy et Royne noz souverains seigneur et damme » François Ier et son épouse la reine Claude. Comme pour chaque entrée royale, la ville a préparé de fastueuses festivités, mais elle porte une attention toute particulière à l’accueil de Claude, certes reine de France, mais aussi duchesse des Bretons en sa qualité de fille aînée héritière d’Anne de Bretagne.
Pour lui montrer son attachement, Nantes offre à Claude un cœur d’or émaillé, décoré de mouchetures d’hermine, réalisé par un orfèvre de la ville. Et il s’agit d’un cœur gros comme ça : « cinq marcs, cinq onces, quatre gros, deux deniers d’or », soit 1 393,04 grammes ! Mais, Claude décide à son tour d’offrir ce cœur à la Ville de Nantes. A cet effet, « fut cedit cueur fondu par Pierre Pillays, maistre de la monnoye de ceste dite ville ». C’est pourquoi de ce joyau éphémère, symbole de l’attachement entre une cité et sa souveraine, il ne reste rien. Rien ? Peut-être pas…
En effet, à l’issue des opérations d’affinage du métal, Pierre Pillays trouve 1 388,16 grammes d’or pur valant « la somme de 774 livres, 14 soulz tournois ». Cette somme est aussitôt portée au compte des recettes municipales. Par la suite, même si les archives n’en parlent pas, l’or est dûment transformé en monnaies sonnantes et trébuchantes. La quantité de métal précieux récupérée du cœur permettait à Pierre Pillays de frapper 400 écus environ. Or, de récentes recherches ont permis l’identification du différent de Pierre Pillays : un carreau d’arbalète la pointe en haut placé à la fin de la légende du revers.
Dès lors, il devient possible d’identifier des écus ayant peut-être été faits avec de l’or du cœur de la reine Claude… On ne peut être catégorique, car certains écus ont pu être frappés avec un autre or, mais ceux faits à partir de ce cœur présentent nécessairement les mêmes marques que celui reproduit ci-après.
Détail de la lettre d’atelier et du différent de maître :
Archives Municipales de Nantes AA 29.
Archives Municipales de Nantes CC 108.
Daniel Cariou, « Les différents de maître de Pierre Champion retrouvés ? Autres différents sous François Ier », Annales de la Société Bretonne de Numismatique et d’Histoire, 2002, pages 69 à 74.
4 L’auteur remercie Muriel Rouaud pour son aide.
Gildas SALAÜN
Musée Dobrée inv. 992.1.3
Écu d’or de Bretagne frappé à Nantes au nom de François Ier
et figurant un carreau d’arbalète la pointe en haut.