Exposition 'Monnaie, monnaies !' au musée de Bibracte (Mont Beuvray - 71990)

L'équipe du musée de Bibracte (Mont Beuvray - 71990) présente jusqu'au 11 novembre 2018 une très intéressante exposition 'Monnaie, monnaies !'. Conçue en partenariat avec le musée monétaire cantonal et le Musée cantonal d’Archéologie et d’Histoire de Lausanne, et avec la collaboration des laboratoires IRAMAT-CRP2A-LaScArBx (CNRS-UBM) et AOROC (CNRS-ENS), le propos de celle-ci est  de replacer les monnaies celtes dans une perspective historique longue, depuis les premières écritures comptables de Mésopotamie jusqu’aux monnaies virtuelles de l’Internet.

Mobilisant les collections monétaires issues de 150 ans de fouilles archéologiques à Bibracte, l’exposition est complétée par les prêts d’une quinzaine d’institutions françaises et suisses. Une partie des contenus est une adaptation des textes rédigés sous la direction de Lionel Pernet, directeur du Musée cantonal d’Archéologie et d’Histoire de Lausanne et Julia Genechesi, directrice ad interim du Musée monétaire cantonal de Lausanne (Suisse), pour l'exposition " Les Celtes et la monnaie. Des Grecs aux Surréalistes " organisée par ces musées à Lausanne en 2017. Le catalogue de l'exposition est par ailleurs disponible à la vente (voir recension de celui-ci dans l'article du Bulletin Numismatique 178 "Les Celtes et la monnaie - Des Grecs aux surréalistes").

La monnaie, instrument d'échange parmi d'autres pendant des millénaires, permet de mesurer la valeur des biens et des services. À la différence d'autres supports d'échanges commerciaux (coquillages, bétail, métal entre autres), elle est également un vecteur puissant de transmission du Politique. Adoptée par les Celtes au IIIe siècle avant notre ère, l'exposition cherche à comprendre les raisons de ce choix. Lorsque les Celtes se mettent à battre monnaie, ils sont en effet déjà impliqués depuis des siècles dans des systèmes d'échanges économiques complexes. Le propos est donc de comprendre pourquoi ils adoptèrent ce nouvel instrument de commerce. Mais également de déterminer de quelle manière les usages monétaires des Celtes nous renseignent sur leur organisation sociétale mais aussi sur notre rapport actuel à la Monnaie.

On sait aujourd'hui que les Celtes donnaient des fonctions et usages différents aux monnaies qu'ils frappèrent. Certaines monnaies comme les statères en or n'étaient utilisées que lors de transactions extra-ordinaires (cadeaux diplomatiques, dépenses militaires par exemple). La plupart (en argent ou alliage cuivreux) servaient aux échanges quotidiens (achat-vente de produits agricoles, d'artisanat, règlement des soldes des soldats etc.). Les monnaies jouent également un rôle dans les pratiques religieuses en servant d'offrandes dans certains lieux sacrés ou dans les sépultures funéraires. Ce n'est qu'avec la réforme monétaire d'Auguste que les monnayages gaulois s'effacèrent au profit des monnaies romaines.

Partons ensemble à la découverte des salles de l'exposition  'Monnaie, monnaies !'

• Objets de valeur

La première étape du parcours présente la période "pré-monétaire" de la civilisation celte. La fonction monétaire n'est pas lié, loin s'en faut!, à l'objet monnaie. L'essentiel est que cet objet soit facile à transporter, qu'il se conserve dans la durée et surtout que son rôle d'étalon soit accepté par l'ensemble des acteurs du monde économique.

Ces objets monétaires revêtent diverses formes : coquillages, barres de métal, parures, sacs de céréales, bétail mais aussi broches à rôtir, torques en or.

• Pile ou face, aux origines des monnaies celtiques

On trouve trace des premières monnaies celtiques vers 300 ans avant notre ère. Il s'agit dans un premier temps d'imitations plus ou moins fidèles (le plus souvent adaptés à l'art gaulois) de monnaies grecques circulant autour de la Méditerranée : monnayage de Philippe II de Macédoine et d'Alexandre le Grand pour les peuples de la Gaule septentrionale et d'Europe centrale, monnaies d'argent des comptoirs grecs comme Marseille, Emporion ou Rhodes pour les peuples de Gaule méridionale.

D'abord imitations fidèles, les monnaies celtiques s'éloignent du modèle grec : les légendes mal comprises se déforment, l'iconographie s'adapte à l'art gaulois.

•  De la mine à la bourse

Première étape de la fabrication d'une pièce de monnaie : la recherche de la matière première, le métal. Vient ensuite l'extraction et la frappe. Le choix des métaux monétaires varie selon les régions, les pratiques et les périodes. Le sol de la Gaule riche en minerais (or, argent, cuivre, plomb, étain, etc.) permet un approvisionnement directement à la source du métal. Celui-ci est complété par la refonte d'objets et le commerce des matières premières.

Les ateliers monétaires ont laissé peu de traces mais outre la frappe, deux autres méthodes de fabrication sont attestées, le fonte dans des moules bivalves et des moules de cire perdue. En illustration ci-dessous un coin monétaire en bronze datant de la fin du IIe à la première moitié du Ier siècle avant notre ère découvert à Bibracte (crédits photos © Bibracte, Antoine Maillier).

• Gros et petits sous, miroirs des sociétés

La première fonction d'une pièce de monnaie est bien entendu de permettre l'échange commercial ou de rémunérer un service. Formidable accélérateur économique, elle influence et transforme en profondeur les sociétés qui l'adopte. Dans le monde celte les autorités émettrices sont multiples : familles aristocratiques, peuples, cités, confédérations économiques, commerçants ou pouvoirs religieux. En fonction de celles-ci, de leurs situations géographiques (sanctuaire, camp militaire, oppidum...) leur usage est plus ou moins développé et leur imprégnation sur le territoire plus ou moins forte. Dès le IIIe siècle avant notre ère, les pièces de monnaies sont utilisées quotidiennement dans certains territoires, deux siècles plus tard leur usage est généralisé dans les oppida comme Bibracte.

• Tout un symbole

Cette partie de l'exposition aborde les usages symboliques et religieux des pièces de monnaie par les celtes. Fréquemment les fouilles archéologiques de lieux de cultes celtiques permettent la mise à jour de lots de monnaies déposés intentionnellement comme offrande. En revanche on retrouve peu de monnaies dans les sépultures gauloises.

• Réalisme et surréalisme

La dernière salle de l'exposition met en lumière la richesse de l'art et de l'iconographie des celtes. Longtemps considérée comme une version dégénérée et grossière des monnaies gréco-romaines, la richesse de l'iconographie celte fut redécouverte dans les années 1920 par André Breton et les surréalistes. Mélange savant d'abstraction, de figuration, de symbolisme, ces monnaies au style extrêmement stylisé et unique n'ont pas cessé depuis de nous surprendre et de nous apprendre.

Monnaie, monnaies !
Exposition du 15 juin au 11 novembre 2018
Tous les jours de 10h à 18h
Accès à l'exposition compris dans l'entrée au musée
 

Musée de Bibracte - Mont Beuvray
71990 SAINT-LÉGER-SOUS-BEUVRAY
www.bibracte.fr
info@bibracte.fr