Découverte et partage : l'exemple du 50 Francs Jacques Cœur

Il arrive que des collectionneurs refusent de faire figurer leurs billets dans tel ou tel inventaire, pensant que, ce faisant, leur trésor devient plus rare ou plus intéressant.
Étrange démarche, car il est pourtant évident que sans référence, sans information, sans pointage ou inventaire, un billet n'a d'intérêt que pour un groupe limité d'initiés et, potentiellement, sera recherché par moins de collectionneurs.
Diffuser les informations permet de faire évoluer un thème de collection. Les exemples récents sont multiples : les billets du Trésor ou ceux de juin 1940 qui, grâce à Yann-Noël Hénon, sont de plus en plus prisés (Les Billets d'Urgence de 1940), les petits numéros répertoriés par Claude Fayette et le blog Kajacques, les fautés, les alphabets rares et, bien sûr : le Jacques Cœur.

Depuis de longues années Hervé Jarrige s'est mis en tête de pointer systématiquement les 50F Jacques Cœur, plusieurs amateurs l'ont désormais rejoint dans cette quête. Chaque date, chaque alphabet, chaque lettre sont répertoriés et le résultat est largement partagé (https://www.kajacques.fr/pointages/50f-jacques-coeur/). Le Jacques Cœur en tant que billet de collection n'a rien de spécial… rien, sauf une fabrication et une émission incomplètes et de nombreuses interrogations.
Rechercher ce billet peut sembler saugrenu à certains collectionneurs. Objectivement, toute collection peut être considérée comme tel, la rareté ou l'intérêt supposé de l'objet convoité n'entrent pas nécessairement en jeu. Picasso a produit près de 50 000 œuvres, la France a émis près de 5 000 timbres différents (sans compter les variantes !), un site propose des lots de 100 000 timbres du monde, tous différents, il existe près de 8 000 cartes Pokémon… bref, tout est possible : il n'y a pas de sous-collection, pas de hiérarchie. Il y a des collectionneurs qui se découvrent une passion commune, discutent, échangent, partagent, créant du lien, formant des groupes. Le thème de collection se structure, évolue, s'ouvre aux curieux. Blogs, livres, articles, toute diffusion d'information apporte une pierre à l'édifice et le pérennise.

Ainsi en va-t-il du 50 Francs Jacques Cœur, donc…
Dans notre vente de Live Auction de décembre 2018, nous proposions un Jacques Cœur en état AB (Lot 4270053), avec deux petits manques… mais daté du 04/09/1941. En 1985, Maurice Muszynski indiquait : Très Commun quelle que soit la date ; en 1990, Claude Fayette notait : 04/09/1941 : très rare, et citait dès 1994 : un A.114 signalé dans les archives de R. Habrekorn…

Alors oui, le Jacques Cœur est toujours un billet très commun, mais pour ceux qui recherchent les 20 dates d'émissions, celui du 04/09/1941 est très rare.

Ce F.19.13 (unique alphabet connu pour cette date : 114, deux lettres retrouvées : A et N) en état AB a réalisé 1 550 euros. Le précédent, et seul autre exemplaire, que nous ayons proposé (en 2014 !) était en pr.TTB et avait atteint 4 968 euros !
Jusqu’à il y a peu, dans son inventaire, Claude Fayette en connaissait cinq… mais depuis février 2019, un sixième exemplaire a été découvert.
(http://www.fayette-edition.com/inventaire_XX/inventaire_B19.php#1941).

L'heureux inventeur est Fabien Alleman et, comme à son habitude, il s'est empressé de partager sa trouvaille : un A.114 n°10086 en état TB. Depuis plus de 25 ans que la rareté de cette date est connue, une telle découverte est une bénédiction pour un collectionneur aussi averti que M. Alleman.

Ce qui est vrai pour le Jacques Cœur l'est aussi pour bon nombre de billets français. Les surprises sont toujours possibles, les pointages et inventaires de plus en plus essentiels. Collectionneurs, débutants ou confirmés, n'hésitez pas à vous spécialiser, à devenir la référence et à partager vos questionnements, vos découvertes, vos conclusions. Comme toujours, le Bulletin Numismatique et le blog de Cgb.fr sont ouverts à vos propositions d'articles, de tableaux ou de listes de pointages.